Diane 35 : "je suis une miraculée"

L'Agence du médicament (ANSM) a annoncé mercredi la suspension d'ici trois mois de la commercialisation de Diane 35, des laboratoires Bayer, et de ses génériques, un traitement anti-acné abusivement utilisé comme contraceptif et qui a fait quatre morts en 25 ans.
L'Agence du médicament (ANSM) a annoncé mercredi la suspension d'ici trois mois de la commercialisation de Diane 35, des laboratoires Bayer, et de ses génériques, un traitement anti-acné abusivement utilisé comme contraceptif et qui a fait quatre morts en 25 ans. © MAX PPP
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avec Sandrine Prioul , modifié à
TÉMOIGNAGE E1 - Marjorie a eu un AVC, à 22 ans, alors qu'elle prenait le traitement.

Son témoignage. "Enfin. Au bout de 25 ans, on se réveille en France. C'est fou qu'on ait dû attendre autant de temps." Marjorie, qui se confie jeudi au micro d'Europe 1, a aujourd'hui 29 ans. Il y a sept ans, elle a été victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC), alors qu'elle prenait le médicament Diane 35 comme contraceptif. Elle ne présentait ni antécédents, ni comportements à risques, et les médecins se sont toujours demandés ce qui avait bien pu causer son AVC. Jusqu'au moment où, il y a peu, ils se sont tournés vers Diane 35. Marjorie a aujourd'hui décidé de porter plainte.

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Le contexte. L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) vient d'annoncer la suspension d'ici à trois mois de la commercialisation de ce traitement et de ses génériques. Diane 35, produite par les laboratoires Bayer, est à l'origine en France de plus de 120 accidents (thromboses, embolies pulmonaires, AVC...), dont quatre ont été mortels, en 25 ans. Le traitement, commercialisé dans 116 pays, n'est autorisé dans l'Hexagone que depuis 1987, comme traitement de l'acné. Mais il a été prescrit par de nombreux médecins en tant que contraceptif.

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Beaucoup de soupçons. "On se demande, au sujet de cette agence du médicament, quelle autorité elle a, quelle indépendance elle a", s'interroge aujourd'hui Marjorie, qui va porter plainte d'ici quelques jours contre les laboratoires Bayer mais aussi l'agence. Sa plainte rejoindra ainsi une quinzaine d'autres concernant Diane 35, ainsi que des dizaines d'autres concernant les pilules de 3 et 4e génération, qui seront déposées toutes ensembles début février. "Je veux bien être en colère contre les médecins qui m'ont prescrit ça. Mais tous les médecins l'ont fait. Quand on laisse les médecins se faire former par des visiteurs médicaux qui ne sont ni plus ni moins que des commerciaux, il y a quand même un gros souci", déplore Marjorie.

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La jeune fille se considère comme une "miraculée" d'être toujours en vie. Mais elle assure que les conséquences de son AVC la suivront jusqu'à sa mort. "Quand on a un AVC en étant toute jeune, il reste toujours une certaine fatigabilité permanente", témoigne-t-elle. Et de poursuivre, amère : "pour se soigner également : beaucoup de médicaments contiennent des contre-indications lorsqu'on a fait un AVC. On est obligé de se soigner avec du paracétamol. Même quand on n'a pas de séquelles, cela nous poursuit à vie."

Bayer se dit "surpris". Mercredi, les laboratoires Bayer ont pris, eux, "acte avec surprise " de la décision des autorités sanitaires. "Le traitement n'a jamais fait l'objet de retrait d'autorisation de mise sur le marché pour des raisons de sécurité dans les pays où il est commercialisé", se défendent-ils. Au grand soulagement de Marjorie, ce sera donc le cas en France, dans trois mois, le temps que les utilisatrices choisissent un traitement plus sûr.

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