Concorde : Continental Airlines coupable

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avec agences , modifié à
La justice a déclaré la compagnie aérienne pénalement responsable du crash du supersonique.

Après dix ans de procédure, quatre mois de débats et six mois de délibérés, le tribunal de Pontoise a rendu lundi son jugement au procès de la catastrophe du Concorde en 2000. Les juges ont déclaré la compagnie aérienne Continental Airlines et l'un de ses employés coupables mais n'ont pas retenu de faute contre les responsables aéronautiques français. La compagnie américaine a aussitôt annoncé qu'elle allait faire appel de cette condamnation qualifiée "d'absurde".

Continental coupable d'homicides involontaires

Le tribunal retient que l'accident a été provoqué par l'éclatement d'un pneu avant droit du Concorde, causé par une lamelle en titane de 43,5 cm, une "bande d'usure" tombée d'un avion de la compagnie américaine Continental Airlines. La compagnie est donc reconnue coupable d'homicides et de blessures involontaires. Le tribunal retient "une maintenance défectueuse" des appareils de la compagnie aérienne américaine qui a entraîné des erreurs techniques.

Continental Airlines est donc condamnée à 200.000 euros d'amende. La compagnie devra également verser un million de dollars de dommages et intérêts à Air France. Le tribunal correctionnel a accordé 500.000 euros de dommages pour "préjudice moral" et 500.000 pour "atteinte à l'image". Il n'a pas retenu le préjudice de "dénigrement". L'indemnisation du préjudice économique de la compagnie française fait l'objet d'une action séparée devant le tribunal de commerce de Pontoise, qui a sursis à statuer jusqu'à la fin de la procédure pénale.

Une dizaine de parties civiles constituées à ce procès se voient accorder des sommes allant de 1.500 à 40.000 euros. La plupart des familles des victimes étaient cependant absentes, car elles ont déjà été indemnisées par les assureurs d'Air France pour une somme tenue secrète, mais qui, selon plusieurs médias, avoisine les 100 millions d'euros.

L'avocat de la compagnie aérienne américaine a dénoncé une décision "qui protège uniquement les intérêts français" et annoncé qu'il allait faire appel de la condamnation. Il y aura donc un second procès.

Un mécanicien condamné à de la prison avec sursis

La cour a également jugé coupable le mécanicien de la compagnie aérienne John Taylor. Il avait monté sur un avion de la compagnie une lamelle qui, tombée de cet appareil, a ensuite provoqué selon le tribunal l'éclatement d'un pneu et la chute du Concorde qui a décollé juste après lui sur la piste. Une thèse réfutée durant tout le procès par la compagnie. John Taylor, absent du procès et visé par un mandat d'arrêt depuis 2005, a été condamné à 15 mois de prison avec sursis. Un autre employé de la compagnie américaine a été relaxé.

La société EADS, qui a succédé à Aerospatiale qui construisait le Concorde, a été pour sa part déclarée civilement responsable de l'accident, même si sa responsabilité pénale n'est pas retenue. Le tribunal retient des négligences dans le suivi de navigabilité du Concorde, dont les défauts étaient connus dès les années 1970 en raison de dizaines d'incidents. Le jugement reproche notamment à l'aéronautique de n'avoir pas réagi au risque d'incendie avéré depuis les années 1990. L'avionneur devra payer 30% des dommages dus aux victimes.

Le "père" du Concorde innocenté

Les juges n'ont en revanche retenu aucune faute pénale contre les trois responsables de l'aéronautique française. "Aucune faute caractérisée ne peut être reprochée à Henri Perrier, [le "père" français du Concorde, ndlr], Jacques Herubel, Claude Frantzen", a dit le tribunal dans son jugement lu en public. Ces trois personnes devraient donc logiquement être relaxées à la fin de la lecture du jugement.

Le 25 juillet 2000, un Concorde d'Air France, transportant 109 passagers, en majorité allemands, avait pris feu peu après son décollage de Roissy et s'était écrasé sur un hôtel de Gonesse, y tuant quatre de ses occupants.