Bruno Wiel, le procès de l’homophobie

La cour d'assises du Val-de-Marne va devoir déterminer si l'agression de Bruno Wiel revêtait un caractère homophobe.
La cour d'assises du Val-de-Marne va devoir déterminer si l'agression de Bruno Wiel revêtait un caractère homophobe. © MAXPPP
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avec Marie Peyraube , modifié à
La justice va devoir déterminer si ses agresseurs l’ont torturé uniquement parce qu’il est homosexuel.

C'est un procès particulièrement douloureux, le procès de l'homophobie, qui s'est ouvert mardi devant la cour d'assises du Val-de-Marne. L'histoire du calvaire d'un jeune homme de 28 ans, Bruno Wiel.

Le 19 juillet 2006, à la sortie d'un bar gay à Paris, il croise la route de quatre jeunes de banlieue désœuvrés. Il accepte de monter dans leur voiture dans des circonstances encore floues et se retrouve dans un parc de Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne. Il y est tabassé, brûlé, sodomisé et laissé pour mort. Il sera retrouvé le lendemain, recroquevillé et nu. Bruno Wiel a ensuite passé 15 jours dans un coma puis sept mois à l'hôpital. A son réveil, la victime n’avait aucun souvenir de ce qui lui est arrivé.

“Ma tête était un ballon de football“

Son calvaire, Bruno Wiel l’a appris plusieurs mois après être sorti de l'hôpital. Sa mère et ses proches lui ont raconté très progressivement ce qu'il avait vécu. C'est ensuite dans le cabinet de son avocate, quand il en avait le courage, qu'il a lu page après page son dossier.

Bruno Wiel a subi une avalanche de sévices. “Ma tête était un ballon de football“, témoigne-t-il aujourd’hui au micro d’Europe 1, avant de confier qu’il “redoute énormément la première journée de procès“, face à ses agresseurs. Il a en revanche une certitude : ces derniers voulait “casser du pédé“.

“Ils avaient clairement ciblé la communauté homosexuelle“, raconte Bruno Wiel :

Aujourd'hui, Bruno Wiel conserve de nombreuses séquelles : il ne peut pas courir, ni faire de sport et ressent des douleurs persistantes dans la mâchoire.

Une bande qui ciblait les homosexuels ?

Son cas est d’autant plus symbolique que les accusés auraient agressé deux autres personnes qui, elles, n'ont pas voulu ni porter plainte ni témoigner. Malgré leur silence, pour Me Caroline Mecary, l’avocate de SOS homophobie, il n’y a aucun doute : il s’agit d’agressions homophobes.

“On a toujours les mêmes actes qui reviennent : le visage qui est massacré, dans 99% des cas, un petit peu comme si le ou les agresseurs avaient une volonté de détruire le visage qui symbolise l’altérité. Ils ne sont pas en mesure de supporter cette altérité. C’est vraiment un point qu’on retrouve dans toutes les agressions à caractère homophobe“, décrypte-t-elle.

Un manque de chiffres sur ce type d’agression

Les agressions homophobes ne font en France l’objet d’aucune étude statistique officielle, mais l'association SOS homophobie a mené sa propre enquête, basée sur les appels passés sur sa ligne d'urgence. Selon ses membres, les appels sont en constante augmentation : parce que les violences se multiplient, mais aussi parce que les victimes ont moins honte d'en parler.

Les quatre accusés risquent la réclusion à perpétuité, d’autant que, depuis 2004, le caractère homophobe d’une agression est une circonstance aggravante, au même titre que le racisme ou l'antisémitisme. Le verdict est attendu le 28 janvier.