Attentat de Karachi : l'enquête tronquée ?

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Dès 2002, la Direction des constructions navales signalait l’existence de contrats commerciaux et de commissions occultes. D'où la piste d'une affaire d'Etat.

La piste Al-Qaïda semble s’éloigner chaque jour un peu plus pour expliquer l’attentat de Karachi au Pakistan, dans lequel 11 employés français de la Direction des constructions navales à Cherbourg avaient été tués en 2002. Selon un document versé au dossier de l’instruction et publié jeudi par Libération, dès le début de l’affaire, la Direction des constructions navales avait transmis une copie d’un contrat la liant au Pakistan pour la vente de sous-marins. Un contrat de près de 700 millions d’euros qui incluait des commissions occultes. Cette piste écartée à l’époque remonte aujourd’hui à la surface.

Plusieurs documents laissent en effet penser à une affaire d’Etat. Dans un courrier du parquet de Paris remontant à 2007, les juges d'instruction indiquent que c'est le non-paiement, en 1996 puis en 2000, de commissions occultes conclues avec le Pakistan pour la vente des sous-marins, qui aurait amené des militaires pakistanais à commanditer l'attentat de Karachi. Le magazine Jeune Afriquecite une note interne de la Direction des constructions navales allant dans le même sens : un acte de représailles.

C’est là que le nom d’Edouard Balladur apparaît dans le dossier. Avant 1996, le premier ministre était en pleine campagne électorale, dirigée à l’époque par Nicolas Sarkozy. Or il ne bénéficiait pas des ressources officielles du RPR, réservées au candidat Jacques Chirac. D’où l’idée qu'il aurait pu avoir besoin de rétro-commissions associées aux commissions versées au Pakistan. Un scénario qualifié de"fable"par l’actuel président de la République. Edouard Balladur a lui-même nié toute irrégularité.

Reste qu’un de ses proches à l’époque donne une autre version des faits. L'ancien ministre de la Défense Charles Millon, nommé en 1995 par Jacques Chirac élu entre-temps, a reconnu avoir bloqué "le versement des commissions pouvant donner lieu à des rétrocommissions".

Des familles de victimes de l’attentat de Karachi avaient exigé, la semaine dernière sur Europe 1, qu’Edouard Balladur et Jacques Chirac soient entendues dans cette affaire. De son côté, le Parti socialiste a demandé une commission d'enquête parlementaire.