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Laura Laplaud
Invité dimanche d'Europe Midi, le psychiatre Antoine Pélissolo dresse un constat inquiétant chez ses patients. Ils sont de plus en plus à souffrir d'éco-anxiété, un sentiment d'angoisse et d'impuissance face au dérèglement climatique, qui toucherait en particulier les jeunes, à mesure que les catastrophes climatiques défilent sous leurs yeux. Il alerte notamment sur la nécessité d'en parler.
ANALYSE

On les appelle les climato-déprimés ou les éco-anxieux. Des jeunes touchés par une éco-anxiété, une forme de détresse psychique, un sentiment d'impuissance face au changement climatique. "C'est une inquiétude qui devient de plus en plus forte ces dernières années, témoigne Antoine Pélissolo, psychiatre, psychothérapeute, chef de service à l'hôpital Henri-Mondor de Créteil et auteur de Les émotions du dérèglement climatique (Flammarion) au micro de Thierry Dagiral sur Europe 1.

"L'impression que l'espèce humaine est condamnée"

L'éco-anxiété est "cette impression que l'avenir est pour certains vraiment bouché, que l'espèce humaine est condamnée", précise-t-il. "La prise de conscience de la dégradation de la planète existe depuis un certain temps mais la nouveauté c'est que certaines générations se disent qu'ils vont être eux-mêmes dans une situation très périlleuse."

Une anxiété chronique largement partagée par cette nouvelle génération. Près de 60% des jeunes souffriraient de détresse liée aux crises climatiques et écologiques, selon une étude parue en septembre, réalisée par l'Université de Bath auprès de 10 000 jeunes de 16 à 25 ans dans dix pays. Plus de 45% ont déclaré que leurs sentiments à propos du changement climatique avaient un impact négatif sur leur vie quotidienne.

Le mal du siècle ?

Une nouvelle génération qui se sentirait anxieuse, impuissante et qui en ferait des cauchemars. "Le choc lié aux images qu'on voit avec les incendies, les épisodes d'inondations, des choses qui sont déjà proches de nous et puis, [il y a ] une projection dans l'avenir", décrypte Antoine Pélissolo au micro d'Europe 1. "Les cauchemars peuvent tourner en boucle, ça peut aussi être les symptômes habituels de l'angoisse, c'est-à-dire les signes physiques qui accompagnent l'angoisse, les troubles du sommeil et surtout un état d'inquiétude majeur."

Des troubles qui ont empiré avec la crise du Covid-19

La crise sanitaire a accentué ce sentiment d'angoisse des jeunes face au dérèglement climatique. "La période de pandémie nous a montré à quel point nous étions sensibles aux choses de la nature et qu'à force de détruire la nature, on avait encore plus de conséquences négatives", expose-t-il. "Je pense que les plus jeunes vivent avec ces inquiétudes depuis longtemps et qu'ils ont été encore plus meurtris par cette pandémie."

Une solution : "de l'écoute, du partage", conseille Antoine Pélissolo. "Il ne faut surtout pas banaliser en disant que ce n'est pas grave, on peut accompagner vers l'action, l'éco-anxiété est justifiée."