Comment les peurs chroniques s'inscrivent dans notre mémoire

 Reconstitution du cerveau par des neuroscientifiques et des ingénieurs (Juillet 2016)
Reconstitution du cerveau par des neuroscientifiques et des ingénieurs (Juillet 2016) © MATTHEW F. GLASSER, , DAVID C. VAN ESSEN / NATURE PUBLISHING GROUP / AFP
  • Copié
Une étude parue cette semaine dans le "Journal of Neuroscience" apporte de nouvelles connaissances sur la mémoire de la peur. 

Et si la peur s'apprenait à la manière d'une leçon ? Une étude, publiée cette semaine dans le Journal of Neuroscience, suggère que nos peurs chroniques sont issues d'un processus d'apprentissage complexe. 

Cette conclusion, formulée par deux chercheurs de l'Université de Californie à Riverside (UCR), permet de comprendre comment des événements troublants deviennent des souvenirs ancrés dans notre mémoire. 

Des trajectoires neuronales particulières. Tout a commencé avec quelques souris dans un laboratoire. Afin d'étudier la peur chez les animaux, deux chercheurs américains, Jun-Hyeong Cho et Woong Bin Kim, ont utilisé une méthode de traçage des neurones de l'hippocampe. 

L'hippocampe est une partie du cerveau localisée dans le lobe temporal et faisant office de centre de la mémoire. Au cours de leurs expériences, les chercheurs ont remarqué que les neurones de l'hippocampe marqués par un stimulus de la peur avaient une double-trajectoire. Les neurones se dirigeaient en effet vers le cortex préfrontal, siège des fonctions cognitives et sensitives, mais aussi vers le complexe amygdalien, impliqué dans les processus émotionnels.

Mais, à quoi sert cet itinéraire particulier ? Selon les scientifiques, il permet la mise en place d'une activité neurale synchronisée proche de celle de l'apprentissage. Les événements tristes et mémorisés sont à terme codés en sentiments de peur permanents. Dès lors, un contexte précis peut devenir synonyme d'un souvenir de peur. Pour Jun-Hyeong Cho, l'étude permet de révéler "le rôle jusque-là ignoré des voies neuronales entre hippocampe, amygdale et cortex préfrontal dans le processus d'apprentissage de la peur". 

L'espoir de nouvelles thérapies. La peur chronique est aujourd'hui un sentiment partagé par des millions d'individus à travers le monde. PTSD United, une association non-lucrative d'aide aux victimes d'anxiété, révèle sur son site que près de 8 % des Américains souffrent actuellement d'un trouble de stress post-traumatique, en anglais PTSD (Post-traumatic stress disorder). En France, un rapport de la Haute Autorité de Santé (HAS) rapportait en 2007 qu'entre 15 et 21 % de la population âgée de 18 à 65 ans souffraient de troubles anxieux. 

Selon les chercheurs de l'UCR, l'étude publiée cette semaine porte l'espoir de "développement de nouvelles thérapies permettant de lutter contre la peur pathologique et les conséquences de troubles de stress post-traumatique."