Didier Maus : "Macron ne veut pas bouleverser les institutions mais changer les habitudes"

Le spécialiste du droit constitutionnel Didier Maus était l'invité d'Europe nuit, lundi.
Le spécialiste du droit constitutionnel Didier Maus était l'invité d'Europe nuit, lundi. © DR
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M.L , modifié à
Pour le spécialiste du droit constitutionnel Didier Maus, invité d'Europe nuit, lundi, les annonces faites par le président de la République à Versailles ne posent pas de problème "technique" du point de vue de la Constitution. 
INTERVIEW

Emmanuel Macron a multiplié les annonces, confirmant plusieurs points de son programme, lundi à Versailles, devant le Parlement réuni en Congrès. Levée de l'état d'urgence, réduction du nombre de parlementaires, introduction d'une dose de proportionnelle aux législatives... Autant de réformes qui nécessiteront parfois de modifier la Constitution. Sont-elles toutes faisables ? Oui, selon Didier Maus, invité d'Europe nuit, lundi soir. "On ne veut pas bouleverser les institutions, mais changer les habitudes", assure le spécialiste du droit constitutionnel. E

Entre six mois et un an pour redessiner les circonscriptions. Pour supprimer un tiers des députés et sénateurs, "techniquement, il n'y a aucun problème", juge l'expert. "Il faut une loi organique parce que le plafond est dans la Constitution, mais cela ne pose pas de problème." Quant à la proportionnelle, une loi ordinaire modifiant la loi électorale suffirait. "Après, si on met une dose de proportionnelle, ça veut dire qu'il y aura X% de députés qui ne seront pas élus au scrutin majoritaire. Donc automatiquement, si vous combinez les deux, il va falloir redécouper les circonscriptions, c'est un travail dont on a l'habitude : on le fait une fois tous les vingt ans", explique Didier Maus. "Il y a une commission indépendante qui donne son avis : il y en a pour six mois, huit mois, un an, et ce n'est applicable que la deuxième fois." 

" Peut-être le Premier ministre sera-t-il un peu plus loquace...  "

La proportionnelle, entre "gadget" et plafond. Le constitutionnaliste est plus sceptique sur les contours de la "dose" de proportionnelle, pour l'instant selon lui très flous. "Qu'est ce que c'est ? On n'en sait rien. Prenez un exemple : vous avez 200 députés, vous dites qu'il y en a 180 qui sont élus au scrutin majoritaire et 20 à la proportionnelle, ou vous dites qu'il y en a 160 qui sont élus au scrutin majoritaire et 40 à la proportionnelle... Dix pour cent, c'est un gadget. Vingt pour cent, c'est considéré par beaucoup d'observateurs comme étant un plafond. Entre les deux, qu'est-ce qu'on fait ? Peut-être le Premier ministre (qui doit prononcer son discours de politique générale mardi, ndlr) sera-t-il un peu plus loquace demain que ne l'a été le président aujourd'hui."

Quant à la promesse d'Emmanuel Macron de réunir le Parlement en Congrès une fois par an, elle est parfaitement conforme à la Constitution depuis la réforme initiée par Nicolas Sarkozy en 2009, selon Didier Maus, qui pointe un risque plus politique : "'cela veut aussi dire qu'il va falloir qu'il rende compte de ce qu'il fait. Certes, il n'y a pas de vote, mais il faudra qu'il s'explique. Aller à Versailles pour ne rien dire, très honnêtement, ça ne sert à rien."