Les législatives, la face cachée des alliances

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Après l'accord programmatique, Yannick Jadot et Benoît Hamon doivent trouver un accord sur les législatives, au moins aussi important. © GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
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Les candidats ont tendance à mettre leur rapprochement programmatique en avant quand ils s’allient. Mais les candidatures aux législatives sont un autre enjeu d’importance. 

Yannick Jadot rejoint Benoît Hamon pour faire gagner la gauche et l’écologie. François Bayrou s’allie à Emmanuel Macron pour faire gagner le centre et moraliser la politique. François Fillon veut s’adjoindre son allié de toujours, l’UDI, pour mettre en place une politique d’alternance. Quand des alliances se nouent en vue de la présidentielle, c’est d’abord l’accord programmatique qui est mis en avant. Et il compte bien sûr. Mais il est systématiquement accompagné d’un autre accord, sur lequel les candidats s’épanchement moins, et qui concernent les législatives, qui auront lieu en juin prochain. Et c’est d’ailleurs souvent au sujet de ce scrutin que les discussions sont les plus âpres. Car l’enjeu est d’importance.

  • Hamon-Jadot : EELV veut un groupe parlementaire

L’accord entre Benoît Hamon et Yannick Jadot fâche une partie du PS parce qu’il confirme la ligne de gauche dure du candidat socialiste. Mais ce n’est pas le seul sujet de mécontentement. Les législatives en sont un autre. D’abord parce qu’un projet d’accord, sur le point d’être signé selon Le Monde, prévoit que dans 43 circonscriptions, dont une dizaine gagnables, un candidat écologiste soit aussi soutenu par le Parti socialiste. L’objectif, en cas de victoire de Benoît Hamon, est bel et bien de dépasser les 15 élus pour pouvoir constituer un groupe politique dans la futur assemblée.

Parmi les "circos" réservés à EELV, une retient particulièrement l’attention : celle de Cécile Duflot, à Paris. L’ancienne ministre du Logement conserve sa sixième circonscription, alors même qu’une candidate socialiste, Nawel Oumer, avait été investie par les militants PS. Et comme Cécile Duflot a été battue à la primaire écologiste et qu’en outre elle n’a pas eu de mots assez durs pour le gouvernement sortant, la décision passe mal. Yannick Jadot répond en mettant en avant la plateforme programmatique dégagée, mais le cas Duflot n’a sans doute pas fini de faire grincer des dents.

Autre problème : l’accord que les deux partis sont sur le point de conclure n’interdit pas aux écologistes de présenter des candidats face aux socialistes investis. Et dans certains cas, ils ne s’en priveront pas. La féministe Caroline de Haas pourrait ainsi se présenter dans le 18ème arrondissement de Paris, soutenue par EELV mais aussi le PCF, face à Myriam el-Khomri, porteuse de la si controversée loi Travail. François Ruffin, auteur du film documentaire Merci Patron, pourrait lui aussi être soutenu par les écologistes, mais aussi par les communistes et La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, face à une autre membre du gouvernement, Pascale Boistard.

  • Macron-Bayrou : le salut du MoDem ?

Actuellement, le MoDem ne compte qu’un député sortant, le deuxième, Jean Lassale, ayant décidé de quitter le parti pour tenter l’aventure présidentielle en solo. En s’alliant avec Emmanuel Macron, François Bayrou peut espérer beaucoup mieux. Si l’ancien ministre de l’Economie l’emporte, la dynamique de victoire jouera à plein aux législatives. Et un bon nombre 577 candidats d’En Marche ! aura un bon coup à jouer. Parmi eux, la moitié seront issus de la société civile. Dans l’autre moitié, un tiers a été réservé aux socialistes qui auront rejoint le mouvement, un autre tiers pour des candidats issus des Républicains ou de l’UDI, et un dernier tiers pour le centre, selon Marianne.  

Soit 96 candidats pour des radicaux de gauche, des proches de Jean-Louis Borloo, et des membres du MoDem. Vu l’importance que semble prendre le ralliement de François Bayrou dans la dynamique de campagne d’Emmanuel Macron, le mouvement démocrate pourrait se tailler la part du lion. Et donc voir son nombre de parlementaires exploser. Attention toutefois, car cela est encore théorique. La campagne de ralliement à l’ancien ministre n’est pas terminée, et un accord définitif est loin d’être scellé. Surtout, la victoire n’est pas du tout acquise.

  • Fillon-UDI : le centre-droit veut exister

C’est l’alliance la plus évidente, et pourtant, en matière de circonscriptions, elle tarde à se concrétiser. Les Républicains de François Fillon et l’UDI ne parviennent toujours pas à se mettre d’accord sur le nombre de candidatures accordées au parti centriste. Il faut dire que la formation présidée par Jean-Christophe Lagarde est gourmande. Le maire de Drancy exige entre 90 et 100 circonscriptions gagnables, alors que l'UDI ne compte actuellement que 28 députés.

Mais en face, Les Républicains ne sont pas prêt à être aussi généreux. L’épisode des frondeurs du PS a montré qu’il est beaucoup plus aisé de gouverner avec une majorité très cohérente. Jean-François Lamour, président filloniste de la commission d’investiture des Républicains, était prêt mi-janvier à accorder près d’une soixantaine de d’élus potentiels à l’UDI. Les deux parties n’en finissent pas d’affirmer qu’un accord est proche. Mais pour l’heure, rien d’officiel.

Il faut dire que le "Penelope Gate" a considérablement affaibli le candidat de la droite, qui a plus que jamais besoin de son partenaire. Et l’UDI peut à loisir brandir l’épouvantail Macron, puisque ces membres pourraient être tentés de rallier le candidat d’En Marche ! s’ils ne sont pas satisfaits. L’ancien ministre a d’ailleurs bien pris soin de leur réserver quelques places.