Fraude fiscale : les députés rétablissent à une voix près le "verrou de Bercy"

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avec AFP , modifié à
Le Sénat avait adopté, contre l'avis du gouvernement, un amendement demandant la suppression de ce dispositif donnant à l'administration fiscale le monopole des poursuites pénales en matière fiscale.

Les députés ont rétabli mercredi de justesse en commission le "verrou de Bercy". Cette mesure donne à l'administration fiscale le monopole des poursuites pénales en matière fiscale et empêche les poursuites pour fraude fiscale sans l'accord du ministère des Finances.

Le Sénat, qui avait examiné en premier le projet de loi sur la moralisation de la vie publique, avait adopté, contre l'avis du gouvernement, un amendement du communiste Éric Bocquet demandant la suppression de ce dispositif "dans un souci d'égalité des citoyens devant la justice et devant l'impôt notamment". La commission des Lois de l'Assemblée a adopté mercredi un amendement du gouvernement pour revenir dessus, par 25 voix contre 24, lors d'un vote "assis-debout" ce qui est exceptionnel.

Le gouvernement contre sa suppression. Dans son exposé des motifs, le gouvernement explique notamment que "la règle qui veut que le ministre du Budget ne puisse déposer plainte pour fraude fiscale qu'après saisine et avis conforme de la commission des infractions fiscales protège en effet le contribuable contre une saisine du parquet qui ne serait pas suffisamment justifiée en fait et en droit par l'administration fiscale". La rapporteure (République en marche) Yaël Braun-Pivet, qui était favorable à l'amendement, a aussi affirmé que le vote du Sénat n'avait "aucun lien avec le texte" et qu'il fallait "traiter" la question mais "pas comme ça, pas dans ce texte-là".

Des députés insoumis, communiste, LR, "constructifs", socialistes et également MoDem ont au contraire soutenu la position du Sénat et se sont souvent référés à l'affaire Cahuzac sous le précédent quinquennat. Avec la question du verrou, "on est au cœur du sujet", a assuré Olivier Marleix (LR). Cécile Untermaier (PS) a "constaté une frilosité" du gouvernement et Fabien Roussel (PCF) a appelé les élus de la majorité, qui portent "un nouveau souffle", à "souffler". 

Un dispositif fortement contesté. L'ex-magistrate Laurence Vichnievsky (MoDem) a fait part de son expérience et des limites des poursuites pour le parquet, se disant "complètement d'accord" avec le Sénat, à majorité de droite. Charles de Courson ("constructifs" LR-UDI), qui a été dans le passé rapporteur de la commission des infractions fiscales et essaie de "faire sauter le verrou de Bercy" depuis 25 ans, a évoqué "un système malsain" et "d'Ancien Régime" qui aboutit à une "rupture d'égalité" des citoyens.

Après un premier vote à main levée qui a abouti à une égalité des voix, les députés ont été appelés à se lever pour se prononcer pour ou contre. Le résultat a été serré, certains élus REM s'étant prononcés contre l'amendement du gouvernement tel Paul Molac.