ÉDITO - "L’augmentation des policiers, c’est le salaire de la peur"

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Jean-Michel Aphatie, édité par Grégoire Duhourcau
Le gouvernement n'a pas traîné pour trouver un accord avec les policiers, qui réclamaient une revalorisation salariale. Jean-Michel Aphatie estime sur Europe 1 que "le pouvoir a eu peur qu'une partie des policiers se solidarise avec les 'gilets jaunes'".

Les syndicats de police et le gouvernement ont trouvé un accord, mercredi, concernant une revalorisation salariale des policiers, qui menaçaient de poursuivre leur mobilisation. Un accord intervenu très rapidement parce que "le gouvernement a peur", estime Jean-Michel Aphatie, l'éditorialiste d'Europe 1.

"Vous connaissez le film Le salaire de la peur, sorti en 1953 avec Charles Vanel et Yves Montand. L'augmentation des policiers, c'est le salaire de la peur, ressentie par le président de la République et le gouvernement. Le 24 novembre, le 1er décembre, le 8 décembre (journées de mobilisation des 'gilets jaunes'), les lieux de pouvoir et notamment l'Élysée auraient été envahis par les 'gilets jaunes' si les policiers ne s'étaient pas interposés. Bien sûr, c'est le travail des policiers de s'interposer mais ils l'ont fait dans des conditions de violences extraordinaires, inacceptables en démocratie et avec lesquelles nous avons été beaucoup trop complaisants.

"Le pouvoir a eu peur qu'une partie des policiers se solidarise avec les 'gilets jaunes'"

Le pouvoir a eu peur et le pouvoir a toujours peur parce que, de ce point de vue, la menace de la violence portée par les 'gilets jaunes' n'a pas disparu. Le pouvoir a eu peur qu'une partie des policiers se solidarise avec les 'gilets jaunes'. Le pouvoir a eu peur que la police manque à l'État. C'est extraordinaire d'imaginer cela. On en est là en France, aujourd'hui.

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Christophe Castaner, ministre de l'Intérieur, a ouvert une négociation express mercredi. Et jeudi, le patron de FO police, qui en a vu d'autres, faisait part de sa surprise face à la vitesse des négociations, que cela ait été aussi facile. Mais l'important, c'était de conclure un accord. Christophe Castaner a dit jeudi, que cet accord allait coûter 70 millions d'euros au budget de l'État. Les syndicats disent 160 millions d'euros. Cela montre bien que, du côté du gouvernement, on ne veut pas trop faire les comptes parce que l'important, c'était de lâcher et de conclure l'accord.

"Il fallait rassurer les policiers, les garder du bon côté de la barrière"

Cet accord salarial avec les policiers peut-il inciter d'autres syndicats dans la fonction publique à revendiquer ? Oui, évidemment ! Mais cela n'a aucune importance pour le gouvernement. Il fallait rassurer les policiers, les garder du bon côté de la barrière.

D'une certaine manière, Édouard Philippe, Gérald Darmanin et Bruno Le Maire ont été mis devant le fait accompli. Cet accord salarial avec la police, c'est le contraire de la politique qu'ils mènent dans la fonction publique depuis mai 2017. Ce qui domine au sommet de l'État en cette fin d'année, c'est la peur. La peur, ça a un coût. En 1953, Le salaire de la peur était un beau film. En 2018, le salaire de la peur, c'est du mauvais cinéma."