Comment les Insoumis animent les débats à l'Assemblée nationale

Jean-Luc Mélenchon et les autres députés insoumis, le 4 juillet.
Jean-Luc Mélenchon et les autres députés insoumis, le 4 juillet. © Martin BUREAU / AFP
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Thibaud Le Meneec , modifié à
Depuis le début des travaux dans l’hémicycle, les députés de La France insoumise se posent en principaux opposants à la majorité.

L’Assemblée nationale a repris ses travaux depuis moins de trois semaines, mais les 16 parlementaires de La France insoumise ont déjà fait du Palais Bourbon la scène de leur “combat” contre la large majorité des députés macronistes, au nombre de 309. Au point d’incarner pour l’heure les opposants les plus virulents à la politique gouvernementale, bien plus visibles que les députés Les Républicains, Constructifs ou Nouvelle Gauche, pourtant plus nombreux.

Cravate, Code du travail et place de la République. "Nous sommes une opposition frontale et cohérente à la majorité. On prend le travail parlementaire très au sérieux, assure auprès d’Europe1.fr le député LFI de Seine-Saint-Denis, Alexis Corbière. Du sérieux, certes, mais surtout une remise en question des codes de l’Assemblée. On se souvient de l’arrivée groupée des députés insoumis à Paris, sous le soleil du mois de juin, le poing levé, criant "Résistance !" sur les marches de 'l'Assemblée. 

Les députés insoumis sur les marches de l'Assemblée nationale, le 20 juin.

(Crédit : AFP)

Quelques séances ont passé et la ferveur des 16 insoumis n’a pas faibli. Ils ont tour à tour refusé de se rendre à Versailles pour écouter Emmanuel Macron, puis brandi le Code du travail lors de l’ouverture de la session, mardi 4 juillet. Sans oublier la cravate qu’ils refusent toujours de porter en séance pour protester contre la réforme du Code du travail, contrairement à la tenue exigée par le règlement de l'Assemblée nationale. Et quand ils ne sont pas dans l'hémicycle, ils occupent régulièrement le pavé de la place de la République pour mettre en garde contre ces ordonnances qui vont "casser le Code du travail".

" Il faut des prises de parole ciselées pour sortir d’un débat ronronnant et fermé "

"Prises de parole ciselées". Dernier fait d’armes en date, le discours percutant, lundi, du jeune député du Nord Adrien Quatennens, qui lui a permis d’acquérir un début de notoriété comme en témoigne les nombreux portraits qui lui sont consacrés depuis mardi. "Il a crevé l’écran. Comme lui, les autres jeunes députés sont à l’aise et bien meilleurs que ce que je croyais", se félicite le bras droit de Jean-Luc Mélenchon, Alexis Corbière. Lequel assume de préparer minutieusement ces sorties : "Il faut des prises de parole ciselées pour sortir d’un débat ronronnant et fermé."

Malgré ces coups d’éclat, les Insoumis risquent de ne pas peser très lourd dans les textes, analyse Olivier Rozenberg, professeur à Sciences Po : "L’opposition peut vraiment très peu de choses dans l’écriture de la loi. Seulement 1% des amendements déposés par des groupes minoritaires sont adoptés." "Ça ne nous décourage pas", rétorque Alexis Corbière, qui regrette pourtant que la totalité des 132 amendements déposés par son groupe sur le projet de loi habilitant le gouvernement à légiférer par ordonnances aient été rejetés.

Une attention nouvelle portée sur le Parlement. Pour eux, l’essentiel est ailleurs. "L’opposition est sur deux jambes : elle est parlementaire, mais elle existe aussi au travers de la mobilisation citoyenne. Parce qu’ils sont filmés, les débats dans l’hémicycle peuvent deviennent viraux. Avant, les gens ne s’intéressaient pas aux débats et là, ils suivent ce qui se passe sur LCP", observe Alexis Corbière.

" L’exécutif contrôle sa communication, donc l’attention se porte vers le Parlement "

Un intérêt renouvelé pour la chose parlementaire que confirme Olivier Rozenberg : "Il se passe quelque chose de nouveau à l’Assemblée, qui tient d’abord au taux de renouvellement des députés. Il y a de l’inattendu, on se demande si les députés élus pour la première fois vont être à la hauteur. De plus, l’exécutif contrôle sa communication, donc l’attention se déporte vers le Parlement, qui a des impératifs de transparence."

"Course d’endurance". Reste à savoir si cette très visible opposition va perdurer au sein de l’hémicycle. Olivier Rozenberg se montre plutôt sceptique : "La procédure législative est une véritable course d’endurance, ce qui peut pénaliser les petits groupes, qui se focalisent sur certains textes. Pour eux, la réforme du Code du travail est un enjeu essentiel. Seront-ils aussi virulents sur la loi antiterroriste, par exemple ?"