"Vampirisé", ce maire préfère jeter l'éponge

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Fabienne Cosnay et Mickaël Frison , modifié à
INTERVIEW E1 - Jean-Marie Darmian, maire de Créon, en Gironde, explique pourquoi il ne se représentera pas.

Dominique Voynet, maire EELV de Montreuil, a créé la surprise en annonçant sa décision de ne pas de se représenter. "Je ne me retrouve plus dans cette vie politique", a expliqué mardi l'ancienne ministre de l'Environnement. Comme elle, Jean-Marie Darmian, maire depuis 1995 de Créon, petite commune girondine de 4.200 âmes, a décidé de ne plus se représenter aux élections municipales, malgré une réélection quasi-assurée. L'édile explique pourquoi sur Europe 1.Interview.

Vous êtes maire depuis 1995, et vous raccrochez. Pourquoi ?

"Un sentiment d'impuissance". "Je raccroche car un sentiment d'impuissance pèse sur la fonction de maire. Nous sommes le dernier rempart de la proximité. Je connais d'autres mandats où la pression est totalement différente. Député, c'est lever la main, se montrer le mercredi à la télévision. Conseiller général, c'est gérer un département avec une distance très longue des administrés. Le maire est en première ligne, 24h/24, sans forcément les moyens pour répondre aux demandes des administrés."

"Des guérisseurs sociaux". "Autrefois le maire bâtissait, avançait, construisait. Maintenant il répare. On est tout le temps dans la réponse immédiate à des cas individuels. Nous sommes devenus des guérisseurs sociaux. Pour l'emploi, le logement, les places en maisons de retraites.... Quand l'administré a tout essayé, il va voir le maire", raconte l'édile, non sans d'amertume. "Sur les transports, les rythmes scolaires, etc. Pour protester, les gens ne vont pas voir le ministre. Il vont voir le maire, un peu devenu le punching ball.  

Dominique Voynet raccroche à Montreuil. Elle parle d'un sentiment de "tous pourris", que l'on met tout le monde, maire inclus, dans le même sac...

"C'est une souffrance d'être maire aujourd'hui. Souffrance de cette généralisation de la fonction de maire. Etre maire de Montreuil ou de Créon, pour les gens, c'est pareil ! Il est censé avoir les mêmes moyens de répondre. Dimanche, on m'a appelé trois fois entre 13h et minuit : une dame s'est échappée d'un EPHAD, une personne dort dehors, il faut trouver un abri, un enfant de 5 ans a des convulsions, il faut peut-être l'évacuer en hélicoptère... C'est le quotidien !" "Ce n'était pas comme ça, avant. Il y avait une prise en charge individuelle beaucoup plus forte des problèmes".

Quel conseil donnerez-vous à votre successeur ?

"Qu'il ne parte pas sur les mêmes bases que moi, qu'il voie les choses de façon un peu plus lointaine. Qu'il se préserve de cette vampirisation que représente la fonction dans la vie sociale quotidienne".