Sauf surprise, Abdoulaye Wade sera reconduit dans ses fonctions à la publication officielle des résultats d'ici vendredi soir. Après dépouillement de 95% des bulletins, le président sénégalais sortant obtiendrait 56,08% des suffrages, et il ne manque plus que les résultats des régions administratives de Koungheul, Kaffrine ainsi que des votants de l'étranger. Les résultats officiels doivent être confirmés par le Conseil constitutionnel après examen de toute plainte concernant des irrégularités. Certains des 14 autres candidats ont dit qu'ils contesteraient les résultats si Wade l'emportait dès le premier tour ce qui, selon eux, ne serait possible qu'en fraudant. Une participation record de 70% des inscrits a été enregistrée au premier tour de la présidentielle, qui s'est déroulé sans incident notable. Le Rassemblement africain pour la défense des droits de l'homme, une ONG basée à Dakar, a souligné la nécessité d'"éviter toute manipulation" de l'électorat. "Il faut respecter scrupuleusement le pouvoir des institutions (...) de proclamer les résultats dans la sérénité", a-t-il ajouté dans un communiqué. Mais Abdoulaye Bathily, un des 14 concurrents de Wade, a dénoncé mardi comme "inacceptables" les résultats partiels annoncés la veille par Macky Sall, Premier ministre et directeur de campagne de Wade. Selon ce dernier, le président sortant recueillerait "largement les 50% requis pour être élu au premier tour", supprimant dès lors la nécessité du second tour prévu à la mi-mars. "Ces résultats ne reflètent pas l'état d'esprit de la population qui, dans la réalité, a exprimé un rejet massif du régime de Abdoulaye Wade, avec tout ce qu'il représente comme contre-valeurs", a dit Bathily. L'état-major électoral de Bathily dit avoir noté de nombreuses irrégularités, dont la possibilité de s'inscrire plusieurs fois sur les listes électorales. En outre, l'encre censée être indélébile utilisée pour s'assurer qu'un électeur ne vote pas deux fois partirait à l'eau et des représentants de l'opposition n'ont pas pu vérifier l'identité des votants dans certains bureaux. Le Parti socialiste, principal mouvement d'opposition, chassé de la présidence par Wade en 2000 après quarante ans de pouvoir, avait déclaré initialement avoir des preuves d'une manipulation du vote. Mais il a semblé revenir mardi sur cette affirmation. "Nous exprimons notre surprise par rapport au score du président Wade. Nous continuons à analyser les résultats qui nous parviennent", a déclaré l'ancien ministre Abdoulaye Elimane Kane, directeur de campagne du candidat socialiste Ousmane Tanor Dieng. La victoire incontestée de Wade, il y a sept ans, avait conforté l'image du Sénégal comme l'un des rares pays d'Afrique pratiquant l'alternance démocratique. La contestation par l'opposition des résultats du scrutin de dimanche fait craindre à certains observateurs que des troubles n'éclatent lors de la proclamation officielle des résultats, entachant cette réputation.