Pourquoi Sarkozy cible-t-il l'Europe ?

© REUTERS
  • Copié
Fabienne Cosnay avec Alain Acco et Stéphane Grand , modifié à
Le président-candidat tend la main aux électeurs qui ont rejeté la Constitution européenne en 2005.

Nicolas Sarkozy a créé la surprise, dimanche, lors de son grand meeting à Villepinte, en plaçant la révision des accords de Schengen au coeur de son discours. "L'Europe doit reprendre son destin en main sinon elle risque la dislocation", a lancé, dramatique, le président-candidat.

Schengen, une proposition de la Place Beauvau

La réforme de Schengen est à l'agenda européen depuis plusieurs mois. Jeudi dernier, les ministres de l’Intérieur de l’espace Schengen avaient une réunion sur le sujet. Une réunion à laquelle Claude Guéant n'a d'ailleurs pas assisté. "S'il n'était pas là, c'est parce qu'il s'agissait d'un endossement formel de décisions prises en décembre. Il était présent aux réunions décisionnelles. Il faut être là quand il faut, pas quand il s'agit des actes notariés", a justifié son entourage, précise le journaliste du Monde Arnaud Lemarpentier sur son blog.

Le sujet Schengen est pourtant devenu central, lors du meeting de Villepinte. Selon des informations Europe 1, la proposition faite dimanche par Nicolas Sarkozy sur Schengen émane en fait d'un conseiller de Claude Guéant, qui a participé à un"brainstorming" de dernière minute Place Beauvau. Le cabinet du ministre de l'Intérieur a en effet été sollicité vendredi par Emmanuelle Mignon, chargée "du projet" du programme de Nicolas Sarkozy, afin de proposer plusieurs idées en matière de sécurité et d'immigration au candidat Sarkozy, avant le meeting de Villepinte.

"La ligne Buisson est aujourd'hui dominante"

Trois jours plus tard, le président-candidat a donc expliqué vouloir "réconcilier l’Europe du "non" et l’Europe du "oui", la France du "non" et la France du "oui". "Ces deux France ne sont pas antinomiques. Elles sont les deux moitiés d’une même Nation (…) C’est la première tâche du président de la République que de savoir organiser la synthèse et la cohérence de ces deux France", a lancé Nicolas Sarkozy. 

Cette synthèse du oui et du non est prônée depuis plusieurs mois par l'éminence grise Patrick Buisson. Le conseiller de l'ombre du chef de l'Etat estime en effet que le clivage gauche/droite est aujourd'hui concurrencé par le clivage du oui/non au référendum de 2005.  "La ligne Buisson est aujourd'hui dominante. L'objectif est de ne pas se couper de cette France-là" (NDLR : la France du non), confiait récemment un membre de l'équipe de campagne du candidat UMP.

"Cela lui permet de s'adresser aux catégories populaires"

Pour le politologue Stéphane Rozès, fondateur de l’agence CAP, Nicolas Sarkozy a réalisé, lors de son meeting de Villepinte, une autre synthèse, "harmonieuse" entre la ligne nationale défendue par Henri Guaino et la ligne identitaire défendue par Patrick Buisson. "Aujourd'hui, plus de 60% des Français sont favorables au protectionnisme européen. Nicolas Sarkozy est donc en phase avec l'opinion", analyse Stéphane Rozès, contacté par Europe1.fr. "La charge contre l'Europe permet au président-candidat de s'adresser aux catégories populaires", ajoute le politologue. Un électorat aujourd'hui favorable à la candidate du Front national, Marine Le Pen et au candidat du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon et que Nicolas Sarkozy n'entend pas délaisser.