Ils ont parrainé le FN et le regrettent

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avec AFP et Xavier Yvon , modifié à
Rencontres avec des maires qui avaient donné leur parrainage à l'extrême-droite.

Le Conseil constitutionnel étudie jeudi matin la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposé par la candidate FN, Marine Le Pen, à propos de l'anonymat des parrainages pour les candidats à l'élection présidentielle. Pour un maire, donner son parrainage au Front national est en effet rarement anodin, surtout pour les élus indépendants. Si quelques uns assument leur choix, soit parce qu’ils partagent les idées du FN, soit par soucis d’équité démocratique, la majorité des élus le regrettent.

"Que tout le monde puisse se présenter"

Patrick Deschuyteneer, maire de Bragassargues, une petite commune du Gard de 130 habitants, a parrainé Jean-Marie Le Pen en 2007. "J'avais donné mon parrainage parce que je pensais qu'il était démocratique que tout le monde puisse se présenter", se justifie-t-il, avant de rappeler que "la fois d'avant, j'avais parrainé Besancenot".

Mais ce maire, élu depuis 1995, a payé ce soutien d’une défaite en 2008. "Une partie du village n'a pas apprécié et a présenté une autre liste en 2008 à caractère plus politique, avec des communistes. Ils ont eu 52% et nous 48%", précise-t-il, avant d’ajouter : "on n'avait toujours eu qu'une seule liste dans notre village".

"La suite a été difficile à vivre"

A l'autre bout de la France, dans les Ardennes, Jean-Claude Etienne, maire de Buzancy, s’est promis de ne plus parrainer qui que ce soit. Après avoir signé pour Jean-Marie Le Pen en 2002, cet élu proche de la droite parlementaire a vu sa "mairie repeinte en bleu avec des graffitis ‘fascistes’ et ‘terroristes’. A la veille des élections, des gens venus de Charleville distribuaient des tracts d'insultes", se souvient-il.

"La suite a été difficile à vivre: j'étais président de commission dans la communauté de communes, et plus personne ne venait me saluer. Cela a duré plus d'un an", poursuit ce chef d'entreprise de 61 ans qui a pourtant voté Chirac en 2002. "Certains ont même attaqué mes enfants, lançant 'ton père est un fascite' et cela je ne l'ai pas supporté", ajoute-il sur Europe 1.

Fort de son expérience amère, Jean-Claude Etienne l'assure : "je ne suis pas prêt d'aller resigner pour qui que ce soit tant que ce n'est pas anonyme. C'est niet et sans bavure".

Le FN "n'a jamais eu d'implantation locale"

Toujours dans les Ardennes, le maire de Senuc ne regrette pas son choix de 2007 mais il ne donnera pas pour autant son parrainage à la fille Le Pen. Et pour cause : pour Hervé Lahotte, Marine Le Pen "a totalement oublié les idées identitaires sur l'immigration".

Cette fois-ci, il parraine donc le tout aussi extrêmiste Carl Lang et décrypte la polémique lancée par le FN. "Le gros problème du FN de Marine Le Pen, c'est qu'il n'y a jamais eu d'implantation locale. Si elle en avait une, elle n'aurait pas de problème. Elle s'appuie beaucoup plus sur les médias", estime-t-il.