Hollande et les catholiques : la réconciliation ?

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Fabienne Cosnay , modifié à
ENJEU - Reçu par le pape François vendredi, le président veut rassurer un électorat hostile à sa politique.

C'est leur premier tête-à-tête. François Hollande est reçu vendredi par le pape François au Vatican. Il s'agit de la toute première audience du chef de l'Etat au Saint-Siège depuis son élection en mai 2012. En effet, jusqu'ici, François Hollande s'était déjà rendu à Rome pour des entretiens avec d'importants dignitaires religieux mais il ne s'était encore jamais entretenu ni avec le pape Benoît XVI, ni avec son successeur. Pour le président, cette visite au Vatican est avant tout pragmatique. L'enjeu : faire un geste politique à l'endroit des catholiques de France.

Jean-Pierre Mignard, fidèle de François Hollande, estime que cette visite répond à "une obligation". "Il y a des relations formelles, diplomatiques, évidentes entre la France et la Vatican, donc ça répond déjà à une obligation", a souligné le co-directeur de la revue Témoignage Chrétien, sur Europe 1. "Mais il y a des obligations qu'on assume avec plus ou moins de plaisir ou de satisfaction : pour le Président de la République, rencontrer le Pape François est une obligation qui sera vécue avec beaucoup de facilité et sans doute avec une curiosité et une empathie particulière", a assuré l'avocat.

"Le contencieux est très lourd". "Le Pape peut être utile sur plusieurs sujets", a indiqué François Hollande, le 14 janvier, lors de sa conférence de presse. En particulier, dans l'apaisement des relations avec l'électorat catholique, très crispé depuis l'épisode du mariage pour tous. "Le président va au Vatican un peu penaud parce qu’il sait que sur les questions de société, le contentieux avec les catholiques est très lourd", analyse Samuel Pruvot, auteur de François Hollande, Dieu et la République, contacté par Europe1.fr.

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Poignant, Mignard, Jouyet l'ont encouragé. François Hollande, ouvertement athée, emmène deux de ses plus proches, tous deux catholiques, dans la délégation qui l'accompagne au Vatican. D'abord, l'avocat Jean-Pierre Mignard, co-directeur de la revue Témoignage Chrétien, le premier que François Hollande a appelé après avoir eu connaissance des intentions de Closer de révéler sa liaison avec l'actrice Julie Gayet. Ensuite, le maire de Quimper Bernard Poignant, l'homme qui murmure à l'oreille du président.

Rassurer les catholiques. Tous deux ont encouragé François Hollande à demander une audience au pape François, dans le but de rassurer les catholiques. Bernard Poignant avait été l'un des premiers à alerter le président de la montée en puissance du mouvement anti-mariage gay. "Ce voyage doit contribuer à un apaisement pour ceux qui étaient énervés (…) Il faut évidemment écouter toutes les confessions de la société et donc l'Eglise", confie au Figaro le conseiller de François Hollande. Son ami de l'ENA, Jean-Pierre Jouyet a aussi mis en garde le président. "Fais attention, François, l'Eglise ne peut pas se prendre des coups tous les matins. N'oublie pas que tu as aussi besoin des catholiques", lui a dit le président de la Caisse des dépôts, quelques jours après qu'une Femen ait profanée l'église de la Madeleine à Paris.

Une lettre pour faire part du malaise. Entre François Hollande et l'Eglise catholique, le malaise va grandissant. Le mariage pour tous a laissé des traces. La loi sur la fin de vie, annoncée par le chef de l'Etat lors de sa conférence de presse, est loin d'avoir arrangé les choses. Sur le Net, une supplique a été adressée au pape François, le 14 janvier, avant la visite de François Hollande au Vatican. Cette lettre ouverte, qui rend compte du malaise des catholiques de France, avait recueilli plus de 115.000 signataires, mardi. Dans cette supplique, des catholiques français alertent le Souverain Pontife sur les projets sociétaux en cours de discussion par le gouvernement français (fin de vie, délit d'entrave à l'avortement, recherche sur l'embryon, théorie du genre, etc.) et demandent au pape François de se faire "l’interprète du profond malaise et de l’inquiétude grandissante de nombreux catholiques de France".

pape françois, vatican

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Mais le pape François n'est pas "moralisant". Les sujets de société "ne seront pas au coeur" de la rencontre entre les deux François, assure l'Elysée."On sait bien que les positions sont divergentes, elles n'ont pas vocation à se rapprocher à l'occasion de cet échange, en particulier sur la question de l'avortement. En revanche, sur la fin de vie, le président "sera tout à fait intéressé d'entendre ce que le pape pourrait avoir à lui dire", assure à l'AFP un conseiller du chef de l'Etat. Mais selon le rédacteur en chef de Famille chrétienne, le face à face entre les deux François sera détendu. "Il est fort peu probable qu’il y ait des esclandres car le Souverain Pontife est tout sauf "un pape moralisant" , assure Samuel Pruvot.

 

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