Est-ce une bonne idée de miser sur les vieux ?

La société doit s’adapter au vieillissement. Jean-Marc Ayrault ouvre les débats vendredi avec la question du maintien à domicile des personnes âgées.
La société doit s’adapter au vieillissement. Jean-Marc Ayrault ouvre les débats vendredi avec la question du maintien à domicile des personnes âgées. © Reuters
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Jean-Marc Ayrault lance une concertation sur l'adaptation de la société au vieillissement de la population.

L'INFO. La pyramide des âges s’élargit à son sommet, et la question de l’autonomie des seniors devient un enjeu majeur. Jean-Marc Ayrault ouvre ainsi une grande concertation vendredi entre l’Etat, les partenaires sociaux et les élus. Maintien à domicile des personnes âgées, offre de logement adapté, rénovation de l’urbanisme et des transports… Le but est de proposer, à terme, une loi d’orientation et de programmation sur "l’adaptation de la société au vieillissement". Michèle Delaunay, la ministre déléguée à l’Autonomie et aux personnes âgées, pilotera les débats.

>> Mais l'exécutif doit-il vraiment mettre beaucoup de moyen pour les séniors ? Cela peut-il bénéficier à toute la société ou faut-il, au contraire, miser sur la jeunesse ? Éléments de réponse.

Michèle Delaunay en visite dans un Ehpad de Lyon

Le vieillissement est bon pour l'emploi. Investir dans l'accompagnement du vieillissement de la population créera-t-il de l'emploi et de la croissance ? C'est en tout cas ce que défend Luc Broussy, auteur d'un des trois rapports remis en mars à Jean-Marc Ayrault pour préparer la réforme de la dépendance. Selon l'INSEE, le nombre de personnes âgées de 75 ans ou plus passera de 5,2 millions en 2007, à 11,9 millions en 2060. Or, les seniors ne sont pas une "tranche d'âge" comme les autres, détaille le Conseiller général PS du Val d'Oise. Ils ont en effet des besoins que les autres n'ont pas. Et ils ont donc davantage besoin de "consommer" certains produits et services que le reste de la population. Investir dans la construction de logements adaptés, développer un réseau de transport à la demande, étoffer les équipes de services d'aides à la personne, financer les technologies de l'autonomie (ascenseur, télétexte, livres audio, domotique adaptée...) sont autant décisions qui entraîneraient un fort besoin de main d'œuvre.

Épargner le budget de l’État, c'est possible? Le rapport reconnait aussi que les finances de l’État et des collectivités doivent être mises à contribution. Mais il détaille aussi une série de propositions qui ne coûtent pas, ou peu, d'argent public : étudier avec les entreprises les moyens nécessaires pour inciter les seniors à consommer, drainer l'épargne des Français vers les technologies de l'autonomie, mener des actions de sensibilisation massive pour intéresser les jeunes aux carrières d'aide aux personnes âgées ou encore élaborer un grand plan d'action fixant des objectifs en matière d'adaptation de logement. Le rapport prône ainsi "un Etat régulateur, un Etat inspirateur, un Etat animateur, un Etat facilitateur". "C’est cela qu’attendent désormais les citoyens, les élus et les acteurs économiques et sociaux : une IM-PUL-SION", martèle Luc Broussy.

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"Un pari risqué". "Le problème, c'est que personne ne chiffre le retour sur investissement d'une telle politique", jugeait pour sa part l'économiste Bruno Jérôme, interrogé par Europe1.fr en mars dernier. En effet, nul ne sait aujourd'hui quel sera le pouvoir d'achat des retraités dans les années à venir. D'autant que l’État réfléchit activement à la manière de réduire le déficit des régimes de retraite. La prochaine réforme prévoit déjà, par exemple, de soumettre à l'impôt les majorations de pension (+10%) pour les retraités ayant eu trois enfants. Et rien ne dit que les futurs gouvernements de décident pas de réduire un jour les pensions, ou en tout cas de moins les augmenter. Or, si le pouvoir d'achat des retraités baisse, leur consommation diminuera également… et le nombre d'emplois liés au grand âge avec. "C'est un pari risqué que de miser trop sur les seniors", tranche Bruno Jérôme. Et de conclure : "mieux vaut, au moins dans le contexte budgétaire actuel, faire des choix et investir en direction de la jeunesse".