Le Festival de Cannes soufflera ses 60 bougies le mois prochain sur la Croisette et si l'événement aura en lui-même un lustre particulier, l'équipe dirigeante entend garder la tête froide et privilégie plus que jamais les films et leurs créateurs. Une vingtaine de films, le nombre habituel, en découdront durant cette manifestation d'une dizaine de jours qui culminera avec la Palme d'or décernée le 27 mai au soir par le jury présidé cette année par le cinéaste britannique Stephen Frears. Comme l'a déclaré le président du Festival, Gilles Jacob jeudi, lors de la présentation de la sélection officielle dans un palace parisien, ce 60e festival sera une "édition un peu particulière" et cet anniversaire "sera célébré contre les anniversaires précédents, c'est-à-dire autrement". Il a mis en exergue la vocation patrimoniale du festival, mais aussi sa perpétuelle adaptation à la modernité et son regard sans cesse tourné vers l'avenir. "Il faut avancer sur plusieurs fronts - a-t-il dit - mêler héritage et modernité... grandes signatures et jeunes pousses". Mais le festival a également vocation à transmettre "un héritage à mettre au service des générations futures". De ce point de vue, la compétition officielle reflète assez bien cette ambition. Sur 21 films en lice, 13 émanent de nouveaux venus, a souligné le délégué artistique Thierry Frémaux, chargé d'établir la sélection officielle. Parmi eux, l'Allemand Fatih Akin et l'Autrichien Ulrich Seidl, le Français Raphaël Nadjari, avec un film israélien tourné en hébreu, un autre Français, Vincent Paronnaud, associé à une cinéaste iranienne, Marjane Satrapi, ou encore le Hongrois Béla Tarr, mélanges qui découragent toute tentative de classer les films par pays. Ces "petits nouveaux" côtoieront des habitués de La Croisette tels les Américains Joël et Ethan Coen, Quentin Tarantino, Gus Van Sant ou James Gray. Ou encore les omniprésents Wong Kar Wai, qui fera l'ouverture avec "My Blueberry Nights", Emir Kusturica ou le Russe Alexandre Sokourov. Symbole là encore de la difficulté croissante qu'il y a de catégoriser les films par leur nationalité, la sélection française, où l'on remarque l'arrivée notable de Catherine Breillat avec "Une vieille maîtresse", adaptation d'un livre de Barbey d'Aurevilly, comportera trois films, mais dont l'un est réalisé par Julian Schnabel. Le réalisateur et peintre new-yorkais a adapté "Le scaphandre et le papillon", livre éponyme de Jean-Dominique Bauby. Christophe Honoré sera lui présent avec "Les chansons d'amour". Les cinéastes américains seront bien représentés durant ce 60e festival puisque, outre ceux qui briguent la Palme d'or, seront reçus, en sélection officielle mais hors compétition, Michael Moore, Abel Ferrara et Steven Soderbergh avec une armada de stars hollywoodiennes (George Clooney, Matt Damon, Brad Pitt, Catherine Zeta-Jones, Al Pacino et Andy Garcia) pour "Ocean's 13". "Parce que l'anniversaire du Festival est un hommage aux artistes, il sera célébré par un film", expliquent les organisateurs. "Deux heures de 33 petits bouts de film", a dit Jacob, qui auront mobilisé 35 cinéastes. Le film en question, "Chacun son cinéma - To Each his Own Cinema", sera une suite d'exercices de style sur le thème de la salle de cinéma et sera projeté le 20 mai à Cannes. Enfin, la manifestation toilettera son site (www.festival-cannes.com) et mettra également l'accent sur la rénovation des salles de projection du palais des festivals, un projet qui est en cours de réalisation mais qui verra la création cette année de la "salle du 60e" réservée aux hommages et à des séances spéciales.