L'humanité à «un malentendu» de «l'anéantissement nucléaire», selon le chef de l'ONU

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Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres s'est adressé aux 191 pays signataires du traité de non-prolifération nucléaire. © SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP
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avec AFP
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a mis en garde lundi les 191 pays signataires du traité de non-prolifération nucléaire (TNP), à l'ouverture d'une conférence. Selon lui, l'humanité n'est qu'à "un malentendu" ou "une erreur de jugement" de l'"anéantissement nucléaire".

L'humanité n'est qu'à "un malentendu" de l'"anéantissement nucléaire", a mis en garde lundi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, réveillant un parfum de Guerre froide tandis qu'Etats-Unis, Royaume-Uni et France appelaient la Russie à mettre un terme à sa "rhétorique nucléaire". Décrivant des crises qui "s'enveniment, avec des tonalités nucléaires", du Moyen-Orient à la péninsule coréenne et à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, Antonio Guterres a largement exprimé ses craintes d'une escalade.

Un danger aussi important qu'à l'apogée de la Guerre froide

"Nous avons été extraordinairement chanceux jusqu'à présent. Mais la chance n'est pas une stratégie ni un bouclier pour empêcher les tensions géopolitiques de dégénérer en conflit nucléaire", a-t-il déclaré à l'ouverture d'une conférence des 191 pays signataires du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). "Aujourd'hui, l'humanité est à un malentendu, une erreur de calcul de l'anéantissement nucléaire", a-t-il martelé, estimant qu'un tel "danger nucléaire n'a pas été connu depuis l'apogée de la Guerre froide".

"L'humanité est en danger d'oublier les leçons de l'embrasement terrifiant d'Hiroshima et Nagasaki", a ajouté le chef de l'ONU, qui se rendra à Hiroshima dans quelques jours pour l'anniversaire du bombardement.

"Pas de vainqueurs dans une guerre nucléaire", affirme Poutine

Le président russe Vladimir Poutine s'est prononcé lundi contre tout conflit nucléaire, à l'heure où l'offensive militaire du Kremlin en Ukraine a ravivé les craintes d'une dérive atomique.

"Nous partons du principe qu'il ne peut y avoir de vainqueurs dans une guerre nucléaire et que cette dernière ne doit jamais être déclenchée", a indiqué Vladimir Poutine, dans un message adressé aux participants d'une conférence des 191 pays signataires du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Dans ce message publié sur le site du Kremlin, il a assuré que la Russie continuait de suivre "la lettre et l'esprit" de ce traité.

Une opportunité de renforcer le traité

Une inquiétude partagée par le président de cette conférence qui se tient jusqu'au 26 août au siège des Nations unies à New York. "La menace posée par les armes nucléaires (...) est revenue au même niveau que pendant la Guerre froide", a ainsi déclaré l'Argentin Gustavo Zlauvinen. "Si nous avons appris quelque chose de la pandémie, c'est que les événements à faible probabilité peuvent se produire, avec un préavis réduit ou sans préavis, avec des conséquences catastrophiques pour le monde. C'est la même chose pour les armes nucléaires", a-t-il ajouté.

Alors cette réunion des parties au TNP, reportée plusieurs fois depuis 2020 en raison du Covid-19, est une "opportunité de renforcer ce traité et de le mettre en adéquation avec le monde d'aujourd'hui", a déclaré Antonio Guterres, espérant une réaffirmation de la non utilisation de l'arme nucléaire mais aussi de "nouveaux engagements" pour réduire l'arsenal. "Eliminer les armes nucléaires est la seule garantie qu'elles ne seront jamais utilisées".

États-Unis, Royaume-Uni et France appellent la Russie à respecter ses engagements

"Près de 13.000 armes nucléaires sont stockées dans les arsenaux à travers le monde. A un moment où les risques de prolifération grandissent et les gardes-fou pour prévenir cette escalade faiblissent", a-t-il insisté. Début janvier, les cinq membres du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni et France), également puissances nucléaires, s'étaient engagées à "prévenir la poursuite de la dissémination" nucléaire, juste avant un nouveau report de la conférence d'examen. Et avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

Lundi, Etats-Unis, Royaume-Uni et France ont réaffirmé cet engagement dans une déclaration commune, réaffirmant qu'"une guerre nucléaire ne peut pas être gagnée et ne doit jamais avoir lieu". Mais les trois puissances nucléaires ont également pointé du doigt la Russie, l'appelant à respecter ses engagements internationaux. "Suite à l'agression non provoquée et illégale de la Russie contre l'Ukraine, nous appelons la Russie à cesser sa rhétorique nucléaire et son attitude irresponsable et dangereuse", ont-ils ajouté.

Biden presse la Russie et la Chine sur le contrôle des armements nucléaires

Le président américain Joe Biden a de son côté appelé la Russie et la Chine à entamer des pourparlers sur le contrôle des armements nucléaires. Il a réitéré que son administration était prête à "négocier rapidement" un remplacement de New START, le traité plafonnant les forces nucléaires intercontinentales aux Etats-Unis et en Russie, qui doit expirer en 2026.

Le TNP, dont les parties examinent le fonctionnement tous les cinq ans, vise à empêcher la propagation des armes nucléaires, favoriser un désarmement complet et promouvoir la coopération pour l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. Mais lors de la dernière conférence d'examen en 2015, les parties n'avaient pas pu parvenir à un accord sur les questions de fond.

"Le monde ne peut pas être en sécurité tant qu'un pays aura des armes nucléaires", s'est inquiétée Beatrice Fihn, directrice exécutive de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN), présente à New York pour l'occasion. "Le TNP reconnait cela. Et les parties doivent maintenant agir".