EDITO - La fuite de Carlos Ghosn, c'est aussi "une source d'embarras en moins pour Tokyo"

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Nicolas Barré, édité par Mathilde Durand , modifié à
L'ex-PDG de Renault-Nissan, Carlos Ghosn, confirme sa fuite au Liban. Dans l'attente d'un procès au Japon, où il était en résidence surveillé, l'homme d'affaires affirme dans un communiqué s'être libéré "de l'injustice et de la persecution politique". Une source d'embarras en moins pour Tokyo juge notre éditorialiste Nicolas Barré. 
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Carlos Ghosn est arrivé au Liban. L’ancien patron de Renault-Nissan, qui attendait son procès en résidence surveillée au Japon, a confirmé sa fuite tout en dénonçant un "système judiciaire japonais partial". "Je n'ai pas fui la justice, je me suis libéré de l'injustice et de la persécution politique", a-t-il ajouté dans un communiqué.  Il était sous le coup de quatre chefs d’accusation pour n'avoir pas déclaré une partie de ses rémunérations, mais aussi pour abus de confiance aggravé. Notre éditorialiste Nicolas Barré décrypte ce nouveau rebondissement dans une affaire qui agite le monde des affaires depuis novembre 2018.

"C’est un rebondissement spectaculaire: Carlos Ghosn a quitté le Japon où il était assigné à résidence. Il se trouve à Beyrouth. 'Je suis à présent au Liban' : l'homme d'affaires l'a confirmé lui-même cette nuit dans un communiqué. Il était jusqu’ici en résidence ultra-surveillée à Tokyo, dans l’attente de son procès. Il a rejoint Beyrouth en passant par la Turquie à bord d’un jet privé.

Il a bien sûr un passeport libanais, en plus de ses passeports français et brésilien. Mais le Liban, c’est son pays de coeur, il y possède des propriétés, un magnifique vignoble, il y a ses amis les plus proches, sa femme Carole est libanaise, la justice japonaise lui interdisait tout contact avec elle dans le cadre d’un contrôle judiciaire particulièrement sévère. Beyrouth, pour Carlos Ghosn, c’est une libération.

La justice japonaise dénoncée

Mais en clair, ça signifie qu’il a fui la justice japonaise ?

Carlos Ghosn affirme que sa fuite ne signifie pas qu'il veut se soustraire à la justice japonaise. 'je n’ai pas fui la justice', dit-il dans ce communiqué, 'je me suis libéré de l’injustice et de la persécution politique'. Il entend donc bien répondre aux accusations du procureur de Tokyo et se défendre. Mais il estime qu’il n’avait pas les moyens de le faire en étant cloîtré à Tokyo. "Je ne suis plus l’otage d’un système judiciaire japonais partial où prévaut la présomption de culpabilité", dit encore Carlos Ghosn. Il a d’ailleurs toujours crié au complot pour l’évincer de la direction du groupe Renault-Nissan.

Cette affaire a jeté une lumière très crue sur la procédure judiciaire japonaise, où l’on cherche à obtenir des aveux par tous les moyens, y compris l’humiliation et les brimades. Beaucoup de Japonais redoutaient le procès de cet homme prêt à dénoncer tous azimuts tous ceux qui ont trempé selon lui dans cette machination. Le Japon accueillera à l’été les Jeux Olympiques. Ce procès risquait de ternir son image. Le départ de Carlos Ghosn, ce n’est pas seulement un soulagement pour le principal intéressé qui risquait des années de prison. C’est aussi aussi d’une certaine manière une source d’embarras en moins pour Tokyo.