Le secteur public britannique crie sa colère

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avec AFP , modifié à
Enseignants et fonctionnaires ont dénoncé jeudi dans la rue la réforme sur les retraites.

Du jamais vu depuis 2006. Défilés et manifestations ont eu lieu jeudi un peu partout en Grande-Bretagne dans le cadre d'une journée de grève contre la réforme des retraites du secteur public, actuellement en discussion. Un véritable défi à l’encontre de l’actuel Premier ministre David Cameron.

De nombreuses perturbations

Dès le début de la matinée, des piquets de grève ont été installés devant des tribunaux, des bâtiments gouvernementaux ou administratifs, des centres pour l'emploi. Des milliers d'écoles, crèches, collèges et universités étaient souvent partiellement ou totalement fermés. Environ 12% des fonctionnaires, soient 750.000 personnes, étaient concernés par le mouvement. Selon la police de Londres, 90% du personnel chargé de traiter les appels téléphoniques étaient absents.

Une ras-le-bol grandissant

"Nous ne faisons pas cela à la légère. Nous ne l'avons jamais fait de notre histoire. Mais le fond de l'affaire, c'est que nous nous inquiétons des intentions à long terme du gouvernement dans l'éducation", a expliqué jeudi une représentante du premier syndicat d'enseignants. "Ce pays est gouverné par des privilégiés, des gens qui gagnent trop d'argent (...) Le fossé entre riches et pauvres se creuse. On pense que ce n'est pas à nous de souffrir pour ça", a confié de son côté Martin Pitcher, un instituteur interrogé dans la manifestation principale, qui a entraîné l'interruption du trafic sur les principaux axes routiers de Londres.

Le mouvement, qui fait écho à la contestation des mesures d'austérité adoptées ailleurs en Europe, pourrait être le premier d'une longue série, ont averti les syndicats.

La retraite à 66 ans, la réforme de trop ?

A l’origine de ce mouvement de grève, une réforme des retraites toujours en discussion. Elle contraindrait les fonctionnaires "à cotiser plus, travailler plus longtemps et recevoir moins une fois à la retraite", selon les syndicats. Et pour cause : les retraites ne seraient plus calculées à partir des derniers salaires mais sur le salaire moyen au cours des carrières. Le taux de cotisation à la retraite augmenterait dans certains cas de 50%, selon l'ATL, et l'âge de départ serait repoussé à 66 ans en 2020, contre 60 pour la plupart des enseignants.

Cette réforme s'inscrit dans la politique de rigueur drastique décrétée par son gouvernement pour éliminer la quasi totalité du déficit public à l'horizon 2015. Elle s'ajoute au gel des salaires et à la suppression de 330.000 postes dans la fonction publique d'ici à 2015. Le mouvement intervient après plusieurs manifestations contre l'austérité, dont la plus importante - qui n'était pas couplée à une grève - avait réuni 250.000 personnes à Londres, en mars.

Cameron inflexible

Le Premier ministre, David Cameron, a jugé ces grèves irresponsables, rappelant que les négociations entre les syndicats et les pouvoirs publics n'étaient pas encore achevées. Pour ce dernier, cette réforme des retraites est "essentielle" à cause du vieillissement de la population, sinon "le système des retraites risque de s'effondrer".

L'opposition travailliste juge également les grèves prématurées du fait de la poursuite des négociations, mais l'agitation sociale reste une étape délicate pour l'équipe de David Cameron. La coalition au pouvoir, première du genre en Grande-Bretagne depuis 65 ans, a dû renoncer récemment à ses projets de réorganisation du système de santé publique (NHS) sous la pression du lobby médical et des libéraux démocrates, partenaires des conservateurs au gouvernement.