Le procès des "diamants du sang"

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Solène Cordier avec agences , modifié à
L'ex-président du Libéria Charles Taylor a été reconnu coupable d'avoir participé à ce trafic.

Les mines de diamants sont paradoxalement un des drames du continent africain. Première productrice de diamants bruts, l'Afrique fournit la moitié du marché mondial. Et pourtant, cette manne est loin de faire le bonheur des Africains. Elle est au contraire considérée comme une malédiction par nombre d'entre eux, victimes des atrocités perpétrées au nom de ces "diamants de sang", des diamants devenus monnaie d'échange dans le trafic d'armes.

Échange diamants contre armes

Le procès de Charles Taylor, reconnu coupable jeudi de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre en Sierra Leone, a permis pour la première fois de juger ce dossier et les drames qui en découlent. Charles Taylor était notamment poursuivi pour avoir créé et mis en oeuvre une campagne de terreur visant à obtenir le contrôle de la Sierra Leone, dans le but d'exploiter ses diamants, lors d'une guerre civile ayant fait 120.000 morts entre 1991 et 2001.

En 2000, les Nations Unies l'avaient accusé de fournir des armes et de l'entraînement aux rebelles sierra-léonais du Revolutionary United Front (RUF), en l'échange de diamants.

Des personnalités impliquées

Le procès de l'ancien président libérien, arrêté en 2006 au Liberia, a donc permis de débattre de l'existence de ces diamants de sang et de leurs circuits. Un des épisodes les plus médiatisés de son procès remonte à août 2010, date à laquelle l'ancien top model Naomi Campbell est entendue par les juges.

Elle reconnaît avoir reçu des diamants en cadeau de Charles Taylor, en 1997 après un dîner de charité auquel ils avaient assisté tous les deux. Avec ce témoignage, l'ancien mannequin avait mis à plat la défense de l'ancien président, qui a toujours nié avoir été en possession de diamants et en avoir offert à Naomi Campbell. Devant le TSSL, cette dernière avait toutefois tenté de minimiser ce présent, évoquant "deux ou trois pierres à l'aspect sale".  

Les cartes des conflits et des mines se superposent

Au-delà de l'aspect "paillettes" de ce témoignage, qui avait entraîné ensuite l'audition de l'actrice Mia Farrow, cet épisode avait permis de rappeler qu'en Afrique, la carte des conflits ethniques et politiques recouvre bien souvent celle des mines de diamants. En Sierra Leone et au Liberia, mais aussi en Angola et en République démocratique du Congo, le contrôle des minerais a déclenché des guerres sanglantes. Les diamants ont souvent constitué une monnaie d'échange précieuse pour certaines factions rebelles ou gouvernementales, en échange d'armes par exemple.

Qu'en est-il aujourd'hui ? Au niveau international, le Processus de Kimberley tente depuis 2003 de lutter contre la mise sur le marché de diamants servant à financer les conflits. Il réunit plusieurs gouvernements, des représentants de l'industrie du diamant et de la société civile. Ce dispositif de certification est toutefois critiqué par plusieurs organisations, qui le jugent inabouti.