L’Espagne veut restreindre (très) fortement l’avortement

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avec AFP
POLÉMIQUE - Le gouvernement conservateur a approuvé un projet de loi qui limite le droit à l’IVG.

L’INFO. L’Espagne est sur le point de replonger dans les années 1980. En tout cas pour ce qui est de sa législation sur l’avortement, car le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy a approuvé vendredi un projet de loi qui limite fortement l’avortement. Ce texte, qui correspond à un retour au système d’il y a trente ans, suscite la polémique dans les rangs des féministes et de la gauche.

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Ce que prévoit le projet de loi. L’avortement ne serait désormais autorisé que dans deux cas très précis : s’il est "nécessaire en raison d’un grave danger pour la vie ou la santé physique ou psychologique de la femme" ou si "la grossesse [est] une conséquence d’un délit contre la liberté ou l’intégrité sexuelle de la femme". En cas de viol, il faudrait en plus que la femme ait déposé plainte. En cas de malformation du fœtus, il faudrait aussi un rapport de deux médecins différents pour que cette raison puisse être invoquée. Et pour les mineures, une autorisation parentale serait nécessaire.

Une promesse de campagne. Limiter l’avortement, c’était une promesse de campagne de Mariano Rajoy en 2011. Le texte annule la loi de 2010, qui permettait aux femmes d’avorter jusqu’à 14 semaines, et 22 semaines en cas de malformation du fœtus. Cette réforme était alors, avec le mariage homosexuel, l’une des réformes phares de l’ancien gouvernement socialiste. Le texte du gouvernement conservateur doit être présenté au Parlement en janvier, où il a toutes les chances d’être adopté, puisque le Parti populaire y dispose de la majorité absolue. La loi pourrait donc entrer en vigueur dès l’été 2014.

Manifestation pro-avortement en Espagne, 460, REUTERS

La contre-attaque s’organise. La période des fêtes n’est pas la plus propice, mais les associations et les partis de gauche ont lancé la mobilisation. Mardi, un collectif de quelque 200 organisations de défense des droits des femmes a rédigé un "pacte pour le droit à l’interruption volontaire de grossesse", signé par plusieurs députées de gauche. Sur les réseaux sociaux aussi, l’indignation est grande. Les opposant au texte se rassemblent derrière le hashtag #MiBomboEsMio, "mon ventre est à moi". Certains accusent le gouvernement de s’être fait dicter son programme par la Conférence épiscopale.

Des scientifiques inquiets. Les opposants à l’avortement se félicitent que le gouvernement ait décidé de faire "un pas en avant vers l’objectif de parvenir à l’avortement zéro". Mais l’association qui chapeaute les cliniques où se pratiquent les IVG assure que cette loi va faire passer dans l’ombre les quelque 100.000 femmes qui choisissent d’avorter chaque année en Espagne, note 20minutos.es. Par ailleurs, six sociétés scientifiques ont signé une déclaration commune pour exprimer leur "inquiétude" face à ce projet et à ses conséquences pour la santé "physique, psychologique et sociale des femmes vivant en Espagne". Ces scientifiques craignent en effet une hausse des avortements clandestins, avec les risques que cela représente.

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