Ce crime de l'IRA qui "rattrape" Gerry Adams

Jean McConville et trois de ses enfants.
Jean McConville et trois de ses enfants. © CAPTURE BBC
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Alcyone Wemaere, avec agences , modifié à
RÉTRO - L'enlèvement et le meurtre, en 1972, d'une supposée "indic" est l'une des pires exactions de l'IRA.

L'arrestation de Gerry Adams, jeudi, a replongé l'Irlande du Nord dans l'un des épisodes les plus noirs de ses trente années de conflit.

La garde à vue du président du Sinn Fein est, en effet, liée à l'enquête sur l'une des pires exactions de l'IRA : l'enlèvement et exécution, en 1972, d'une mère de famille protestante, informatrice présumée de l'armée britannique.

Qui était Jean McConville ? Jean McConville était une protestante de 37 ans, veuve d'un catholique et mère de 10 enfants. Elle a été enlevée en 1972, au paroxysme des "troubles", par un commando de l'IRA, dans le quartier catholique des Falls, à Belfast-ouest.

Jean McConville est l'une des 3.000 victimes des "troubles", la référence pudique usuelle à l'un des pires conflits récents en Europe.  

Que lui reprochait l'IRA ? L'IRA pensait qu'elle était une informatrice de l'armée britannique mais une enquête policière a démenti qu'elle était "une indic". Son seul tort aurait été d'avoir porté secours à un soldat britannique blessé dans un attentat de l'IRA.

L'IRA a-t-elle reconnu l'avoir tuée ?  Jean McConville faisait partie des 16 "disparus" dont l'IRA n'a admis le meurtre qu'en 1999. Elle a été abattue d'une balle dans la nuque. Son cadavre, enfoui sous une plage, a été retrouvé quatre ans après.

Pourquoi l'enquête rebondit-elle maintenant ? L'affaire McConville a refait surface lorsque la police nord-irlandaise a obtenu le droit d'accéder aux enregistrements de chercheurs de l'Université américaine de Boston. Dans le cadre du "Belfast project", ces derniers avaient interviewé des paramilitaires catholiques républicains en les assurant que leurs propos ne seraient pas divulgués de leur vivant.

Dans l'un de ces entretiens, Dolours Price, condamnée à 7 ans de prison pour un attentat de l'IRA de 1973 contre le tribunal londonien d'Old Bailey, désigne Gerry Adams comme celui qui a ordonné le meurtre de Jean McConville.

La famille de la victime connaît-elle l'identité des meurtriers ? Jeudi, un de ses fils, Michael, âgé de 11 ans à l'époque des faits, a accordé un témoignage poignant à la BBC. Il a dit taire l'identité des meurtriers, encore terrifié par les menaces de mort proférées contre lui-même et sa famille.

Contrairement à Michael, sa soeur aînée Helen s'est, elle, déclarée prête à donner le nom des membres du commando à la police.

Gerry Adams a-t-il "les mains sales" ? Gerry Adams, 65 ans, est entendu depuis mercredi soir dans un commissariat du comté d'Antrim, à propos du meurtre de Jean McConville.

Le président du Sinn Fein, qui fut longtemps l'aile politique de l'Armée républicaine irlandaise (IRA), a déclaré s'être volontairement rendu pour se "disculper". Il dément toute implication dans cette exécution, qu'il dit réprouver. Le Sinn Fein a déjà dénoncé "une erreur et une grave injustice".

Admiré pour sa conversion au combat démocratique et son rôle dans le processus de paix, Gerry Adams est haï par ceux qui considèrent qu'il a "les mains sales" et qu'il a commandité le meurtre de Jean McConville.

Sa garde à vue fait craindre des tensions autour du processus de paix scellé en 1998.

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