Au Nigeria, les supporters ont bravé les risques d'attentats

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avec AFP , modifié à
TERRORISME - Le chef de Boko Haram a décrit dans de nombreuses vidéos le football comme une perversion occidentale visant à éloigner les musulmans de la religion.

Risquer sa vie pour soutenir son équipe. De nombreux supporters nigérians ont soutenu leur équipe qui affrontait la France lundi en huitième de finale de la Coupe du monde de football, malgré les craintes d'attentats du groupe islamiste armé Boko Haram qui condamne ce sport.

Le football, cette perversion occidentale. "J'ai décidé de défier les risques sécuritaires pour venir voir les Super Eagles jouer, parce que je vous une passion au football et que j'adore mon équipe nationale chérie", a déclaré Kabir Usman. Ce supporter s'était installé au milieu de beaucoup autres dans un centre de retransmission du match sur grand écran de Kano, la plus grande ville du nord du Nigeria, souvent prise pour cible par les islamistes, pour regarder les Super Eagles qui accédaient pour la première fois depuis 1998 à ce stade de la compétition. Ils ont finalement été battus par l'équipe de France 2 à 0.

Le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, a décrit dans de nombreuses vidéos le football comme une perversion occidentale visant à éloigner les musulmans de la religion. Plusieurs centres de retransmission et terrains de football ont été attaqués ces dernières semaines dans le nord-est du pays. A Damaturu, une vingtaine de personnes avaient été tuées le 18 juin dans l'explosion d'une bombe devant un écran géant où une foule s'était rassemblée pour regarder un match du Mondial, conduisant la police à conseiller aux supporters de regarder la Coupe du monde chez eux.

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Les dernières attaques attribuées aux insurgés islamistes, menées contre des églises, ont fait plus de 50 morts dimanche dans des villages du nord-est, proches de Chibok, où ils avaient enlevé plus de 200 lycéennes mi-avril. A Abuja, la capitale fédérale, touchée par trois attentats à la bombe en trois mois depuis avril, le dernier dans un centre commercial mercredi dernier ayant fait 21 morts, les supporters ont eux aussi affirmé qu'ils ne se laisseraient pas intimider par le risque de nouvelles attaques. "Nous n'avons pas d'électricité chez nous, c'est pour ça que j'ai pris ce risque, mais je suis sûr que rien ne va m'arriver" a affirmé Mba John à l'AFP.
                
"S'ils me tuent, tant que le Nigeria gagne, ce ne sera pas très grave". Pour beaucoup de Nigérians, les bars et les centres de visionnages restent la seule option pour suivre la Coupe du monde. Le Nigeria, bien que premier producteur de pétrole d'Afrique, souffre de pannes de courant quotidiennes, et seule une petite partie de la population peut s'offrir le luxe d'un générateur électrique pour faire fonctionner les postes de télévision pendant ces coupures. Dans le centre d'Abuja où s'est rendu Mba John, comme dans de nombreux bars du pays, la sécurité avait été renforcée pour le match.

"S'ils me tuent, tant que le Nigeria gagne, ce ne sera pas très grave", a déclaré Awa Ezie, un supporter. A Lagos et Abuja, il avait été demandé aux expatriés d'éviter de visionner le match Nigeria-France dans les lieux publics. Lagos est située à plus de 2.000 kilomètres au sud de l'épicentre des violences de Boko Haram, qui touchent essentiellement les Etats du nord-est du Nigeria, à majorité musulmane, mais qui se sont étendues au centre du pays avec les attentats d'Abuja.

"Nous sommes inquiets à Lagos, c'est sûr". En raison des risques d'attaque, les Etats d'Adamawa et du Plateau ont interdit les retransmissions publiques des matchs sur grand écran. A Lagos, où les supporters avaient commencé à se rassembler dès la mi-journée dans le quartier commerçant d'Obalende, l'optimisme des parieurs se mêlait à l'angoisse de ceux qui craignaient une contagion des violences dans la mégalopole jusqu'ici épargnée. "Ici c'est le sud-ouest, la région la plus calme. Nous sommes libres ici", a confié un bookmaker, Binuyo Lewis, 35 ans.

Mais Femi Adeeko, 66 ans, qui tient un hôtel, s'est montré plus angoissé. "Nous sommes inquiets à Lagos, c'est sûr, et les gens ont raison de s'inquiéter quand on voit et qu'on entend ce qui se passe dans les autres Etats du pays". Le président nigérian Goodluck Jonathan, visant Boko Haram, a condamné dans un communiqué lundi les actions menées "par ces agents du terrorisme à l'échelle mondiale visant à désunir et à déstabiliser le Nigeria". L'insurrection de Boko Haram a fait plusieurs milliers de morts depuis cinq ans, et au moins 2.500 depuis le début de l'année, selon des estimations de défenseurs des droits de l'homme.

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