Comment Larossi Abballa est parvenu à déjouer à la surveillance du renseignement

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Surveillé et placé sur écoute à plusieurs reprises, Larossi Abballa est parvenu à échapper aux services de renseignement. © Capture d'écran Facebook
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Chloé Triomphe et , modifié à
Les services antiterroristes français connaissaient bien ce Français de 25 ans ayant assassiné un couple de fonctionnaires de police au nom de l'Etat islamique. 

Il était bien connu des services de police, fiché "S", et avait déjà été condamné dans un dossier de filière de recrutement djihadiste. Pourtant, l'assassin de Jean-Baptiste Salvaing et Jessica Schneider, un couple de fonctionnaires de police, a échappé à plusieurs reprises à la surveillance des services de renseignements français.

Une sortie de prison classique. Il faut dire que Larossi Abballa, abattu lundi soir lors de l'assaut du Raid au domicile des victimes, avait parfaitement dissimulé ses ambitions funestes. Quand il sort de prison en 2013, le jeune homme alors âgé de 22 ans sait qu'il faut suivre les obligations fixées par la justice pour ne pas se faire repérer. Pendant deux ans, il se rend à tous les rendez-vous fixés par la justice avec ses conseillers de probation, soit jusqu'à fin 2015. "Aucun incident n'a été relevé" pendant cette période, a noté le procureur de la République de Paris, François Molins, lors d'une conférence de presse mardi après-midi.

"Dr Food" et "un discours lisse". Auprès des services pénitentiaires d'insertion et de probation, il justifie d'un domicile et d'un travail. Il monte même sa propre petite entreprise de livraison de sandwichs, "Dr. Food", aux Mureaux, début 2016. Devant ses conseillers, il adopte un "discours lisse" sur sa "pratique assidue" de la religion. A sa sortie de prison, Larossi Abballa est placé sous surveillance, mais les écoutes administratives ne révèlent rien de compromettant.

D'après son ancienne petite amie, ce dernier savait parfaitement qu'il était surveillé. "Il m'avait dit qu'il était sur écoute par rapport à son ancienne condamnation et qu'il avait une fiche 'S'. Ça le faisait rire", a-t-elle témoigné auprès de France Info.

Des écoutes, en vain. Il y a quelques mois, le jeune homme originaire de Mantes-la-Jolie refait surface dans les radars des services antiterroristes. Larossi Abballa apparaît cette fois dans un dossier de filière de départs pour la Syrie. Depuis février dernier, il était donc écouté dans ses conversations téléphoniques. Mais là encore, rien n'a permis "à ce jour de déceler le moindre élément" sur "la préparation et un passage à l'acte violent", selon le procureur de la République de Paris, François Molins. Autrement dit, rien qui ne permette de l'interpeller à nouveau. 

"Partir à la chasse aux mécréants". Mais le 13 juin, vers 20 heures, Larossi Abballa tue à l'arme blanche le commandant de police, devant chez lui, puis son épouse, elle aussi fonctionnaire du ministère de l'Intérieur. Seul leur petit garçon réchappe à la mort. Un acte terroriste revendiqué par l'Etat islamique, auquel le jeune homme dira avoir prêté allégeance trois semaines auparavant.

Aujourd'hui, certaines de ses conversations interceptées en 2011 semblent prémonitoires. A ses complices prêts à partir au Pakistan, il déclarait, avant d'être condamné dans cette affaire : "Je veux combattre, Allah va nous donner les moyens de hisser le drapeau, ici, en France. Je vais dégoter des armes et partir à la chasse aux mécréants". Dans l'un des mails envoyés à l'un de ses amis, et auquel Mediapart a eu accès, Larossi Abballa, partage son objectif : "Nettoyage de kouffars (mécréants ; ndlr) !"