Frère Albert condamné à 5 ans de prison

L'ancien frère Albert a reconnu avoir abusé de dizaines d'enfants lorsqu'il était chantre de la communauté catholique des Béatitudes.
L'ancien frère Albert a reconnu avoir abusé de dizaines d'enfants lorsqu'il était chantre de la communauté catholique des Béatitudes. © Maxppp
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avec agences et Benjamin Peter , modifié à
L'ancien moine Pierre-Etienne Albert était jugé à Rodez pour avoir abusé de dizaines d'enfants.

Il avait fait son mea culpa devant la cour. Frère Albert, ancien chantre de la communauté catholique des Béatitudes, a été condamné jeudi à cinq ans de prison avec mandat de dépôt immédiat. Il comparaissait depuis mercredi devant le tribunal correctionnel de Rodez pour des actes de pédophilie commis sur des dizaines d'enfants pendant des années.

Dans un réquisitoire accablant, le procureur Yves Delpérié avait demandé une peine deux fois plus lourde, soit dix ans de prison au total. Décrivant l'accusé comme un "vrai pédophile", un "handicapé du cœur", qui "manque totalement d'empathie pour ses victimes", il avait requis la peine maximale, "parce que cet homme est un véritable pédophile, un prédateur dangereux". La peine est assortie d'une injonction de soins d'une interdiction d'entrer en contact avec des mineurs et d'une obligation de suivi socio-judiciaire pendant cinq ans.

"Ce qu'attendaient les victimes, c'était le mandat de dépôt, qu'il passe la nuit dans une maison d'arrêt", a expliqué sur Europe 1 Me Mazars, avocat d'une victime. Pour lui, la peine prononcée jeudi est "un signe fort de la souffrance entendue par le tribunal". L'avocate de Pierre-Etienne Albert, Me Rudelle, a quant à elle jugé sur Europe 1 la peine "beaucoup trop sévère". "L'importance du comportement et du nombre de parties civiles a eu raison du tribunal", a-t-elle lancé.

Certains faits étaient prescrits

Entre 1985 et 2000, l'ancien moine, aujourd'hui âgé de 60 ans, a reconnu avoir commis 38 agressions sexuelles sur des enfants, filles et garçons, âgés de 5 à 14 ans. En réalité, le nombre de ses victimes serait bien plus élevé. Mais certains faits, prescrits, n'ont pas été étudiés par la justice.

Membre des Béatitudes depuis ses 25 ans, Pierre-Etienne Albert était chargé de composer les chants et la musique de la communauté. Une tâche qui l'amenait à voyager dans toute la France, dans les dizaines de "maisons" de la communauté. Et qui le mettait aussi constamment en contact avec des enfants.

"Renard dans le poulailler"

Pendant le procès, frère Albert, aujourd'hui revenu à la vie civile, n'a pas nié les faits et en a assumé toute la responsabilité. Décrit par les experts comme un "pédophile séducteur", le prévenu s'est lui-même qualifié de "renard dans le poulailler". "Le fait de me retrouver devant la justice est très important par rapport à mes victimes", a-t-il lancé à l'audience, espérant que celles-ci "trouveront un certain apaisement après ce procès".

Mais ce procès aurait aussi pu être celui de sa communauté religieuse, qui était au courant des agissements du moine. Pierre-Etienne Albert avait en effet parlé de ses penchants à plusieurs responsables des Béatitudes. Ceux-ci n'ont rien dit. L'un d'eux, cité comme témoin, a affirmé avoir sous-estimé les faits reconnus par cet homme qui "avait l'habitude des effusions autant avec les adultes qu'avec les enfants".

Le fondateur des Béatitudes entendu

Gérard Croissant, alias Ephraïm, sulfureux fondateur des Béatitudes, aujourd'hui révoqué de cette communauté décriée pour ses dérives sectaires, a également été cité comme témoin. Sa défense ? Ses responsabilités effectives étaient limitées. Il n'a pas été inquiété par la justice. L'enquête visait au départ également la non-dénonciation d'agressions, mais la prescription a joué en faveur des dirigeants du mouvement.

L'avocate de Pierre-Etienne Albert doit le rencontrer vendredi. Elle n'exclut pas de faire appel, mais cette décision pourrait être perçue par les parties civiles comme allant à rebours de la démarche de rédemption de l'ancien frère.