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Chaque jour, Vincent Hervouët traite d’un sujet international.

La visite d’Etat d’Emmanuel Macron aux Etats Unis.

On a tout oublié de leur première rencontre sauf l’interminable poignée de mains devant les caméras. 9 secondes, comme un bras de fer entre collégiens. La surprise de Donald Trump, habitué à gagner ce concours de virilité incongru et qui tombe sur un débutant qui lui tient tête, sourire en coin. Basique mais efficace. Pour se comprendre, encore faut-il parler le même langage. Emmanuel Macron s’adapte parfaitement à ses interlocuteurs. Les deux hommes qui n’ont pas grand-chose en commun se sont trouvés ce jour-là.

Depuis un an, ils affichent leur amitié. Et l’un et comme l’autre, adorent s’afficher. Sur les deux rives, tout est prétexte à se mettre en scène. Les tweets matinaux de l’Américain, les discours très travaillés du Français. Là-bas, l’agitateur en chef imposant son charivari. Ici aussi, le pouvoir entre les mains d’un outsider, tout à fait désinhibé et qui secoue le cocotier. Cette semaine, c’est "Regardez comme ils s’aiment". Et le jour où ils ne s’aimeront plus, regardez quand même ! Donald Trump a trouvé son interlocuteur en Europe.

Pauvre Teresa May qui s’était précipitée à Washington et qui découvre que l’Atlantique est encore plus large que la Manche. Pauvre Angela Merkel restée étanche au charme vulgaire du Donald et qui demeure inconsolable de Barak Obama. Londres et Berlin rivalisent depuis la guerre pour être le meilleur ami de l’Amérique en Europe et tous les autres, les pays latins comme les Scandinaves, les nouveaux venus d’Europe centrale comme les vieux alliés du Benelux tentent d’être le premier de la classe dans l’Otan. Mais c’est la France qui décroche le titre envié ! Elle a attrapé la queue du Mickey, ou plutôt l’attention du Donald. On peut en déduire qu’elle a abdiqué sa singularité gaullienne, que la mondialisation l’a faite rentrer dans le rang. Ou bien que Donald Trump ne fait rien comme les autres. Mais c’est un fait : en Europe, c’est à Emmanuel Macron qu’il s’adresse.

Cela ne veut pas dire qu’il l’écoute.

C’est la limite de leur amitié mutuellement profitable et très sur-jouée. Elle est gratuite, elle ne sert à rien. Donald Trump a déchiré l’accord de Paris, déménagé son ambassade à Jérusalem, il remet en cause tous les traités et fera probablement dans trois semaines des confettis avec l’accord nucléaire péniblement conclu avec les Iraniens et tout cela au grand dam de son ami Emmanuel. Il ne lui demande pas son avis sur la Corée du Nord ou sur l’immigration. La semaine dernière, ils ont bombardé ensemble la Syrie mais c’était comme au stand de tir, sans conséquences, cent missiles et pas un seul mort.

Et si la coopération anti-terroriste est intense, elle l’était déjà, les services spécialisés qui s’en occupent ignorent se moquent de SOS Amitiés. Donald Trump a déjà viré deux de ses épouses, ses associés, ses conseillers et ses ministres. Un jour ou l’autre, son ami français sera lui aussi répudié. Il n’y a pas d’amis au sommet de l’Etat, il y a des moments d’amitié.