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Chaque jour, la matinale d'Europe 1 revient sur l'un des événements sportifs qui fait l'actualité. Ce lundi, Virginie Phulpin revient sur le 14e sacre de Rafael Nadal à Roland-Garros malgré ses douleurs au pied.

Rafael Nadal a remporté son 14ème titre à Roland Garros hier. L’Espagnol a dominé le Norvégien Casper Ruud en trois sets en finale. Pour vous ce 14ème titre à Paris est le plus beau.

À quoi mesure-t-on la beauté d’un titre ? C’est très subjectif. Certains préféreront toujours le premier, celui de 2005, où un adolescent à pantacourt a fait une entrée fracassante dans la cour des grands. D’autres choisiront plutôt celui de 2008, celui de la maîtrise absolue, où Rafael Nadal détruisait méthodiquement chacun de ses adversaires. Bref, on a le choix, avec ses 14 titres. Mais celui-là a une autre dimension. Parce qu’il est inattendu, parce qu’il est douloureux, parce qu’il en dit plus que les autres sur la personnalité de l’Espagnol. Et parce qu’on se dit que c’est peut-être le dernier, et que ça ajoute encore à la dramaturgie de cette quinzaine qui n’en a pas manqué. Il y a un mois, quand Rafael Nadal est sorti du court à Rome en boitant bas, il se donnait peu de chances de participer à Roland Garros. Un mois plus tard, non seulement il a participé, mais il le gagne. On ne retiendra pas grand-chose de sa finale à sens unique contre Casper Ruud hier. Un Norvégien trop impressionné pour bien faire, et un Espagnol à qui rien ne peut arriver sur ce court central, à part de soulever la coupe. D’accord, ça n’était pas une finale de rêve, mais après tout il en avait déjà disputé trois dans le tournoi. 5 sets harassants contre Felix Auger-Alliassime, la bataille nocturne des géants face à Novak Djokovic, et ce combat mental et physique contre Alexander Zverev terminé par l’horrible blessure de l’Allemand vendredi soir. Des montagnes gravies avec un pied anesthésié et la douleur en compagne quotidienne. La fatigue qui vient plus vite, les coups qui font moins mal qu’avant. Rafael Nadal vieillit, vacille, plie, mais ne rompt pas. Parce que son corps le lâche, mais son mental compense. Parce qu’il est à Paris, à Roland Garros, et qu’il y a un rapport presque magique entre ce stade et ce joueur. Dans son état, nulle part ailleurs il n’aurait pu aller au bout. Mais ici, il est chez lui.

Il y a une vraie dimension humaine dans ce 14e titre parisien.

Oui, moins de calculs et plus de cœur, moins de force et plus de peur. Il y aura forcément un moment où on se posera la question de savoir s’il est souhaitable de jouer un tournoi avec des infiltrations pour anesthésier un pied douloureux. C’est une vraie question. Mais Rafael Nadal ne s’est jamais caché. Il l’a dit, il ne pouvait plus marcher après sa victoire contre Corentin Moutet au 2ème tour. On l’a vu grimacer, souffrir, mais rester debout. Jusqu’à quand ? On ne sait pas, il ne le sait pas. C’est bizarre parce qu’hier, vu le déroulement de la finale, on attendait presque plus le discours d’après match que le match en lui-même. Est-ce que l’Espagnol allait annoncer sa retraite ? C’était autant attendu que redouté. Un point final après une ultime victoire, ça aurait été une sortie par la grande porte. Mais Roland Garros sans Rafael Nadal, ça donne le vertige. L’Espagnol ne s’est pas allongé sur la terre battue quand il a gagné, pas plus qu’il n’a dit stop. Parce qu’il veut essayer encore un peu, un dernier traitement pour un dernier espoir. Parce qu’il aime jouer, ici encore plus qu’ailleurs. Mais ne nous voilons pas la face. La prochaine fois qu’on verra le nom Rafael Nadal s’inscrire quelque part à Roland Garros, ce ne sera pas forcément sur la coupe des Mousquetaires. Pourquoi pas sur le court central ? Je n’ai pas envie d’efface Philippe Chatrier, mais 14 titres, ce ne sera jamais égalé. Vous ne trouvez pas que Nadal mérite d’avoir son nom au-dessus de son royaume ?