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Chaque samedi Michael Darmon évoque ce samedi la condamnation des époux Balkany pour fraude fiscale. 

Patrick Balkany a écopé vendredi d'une peine de 4 ans de prison avec incarcération immédiate. Isabelle Balkany, elle, a été condamnée à 3 ans de prison sans incarcération immédiate. Une condamnation qualifiée sur Europe 1 "d'inique et démesurée" par sa femme. Dans tous les cas, c'est bel et bien l'incarcération immédiate qu'a retenu l'opinion publique et qui a été "ressentie comme un véritable coup de tonnerre dans le monde politique", selon notre éditorialiste Michaël Darmon.

"On croyait assister hier au tribunal à l’épilogue d’un thriller politico-financier : le tribunal prononce la condamnation d’Isabelle Balkany, épouse du maire et première adjointe de Levallois. Elle se remet d’une tentative de suicide, elle est autorisée à rester assise lorsqu'elle apprend qu'elle écope de trois ans d’emprisonnement mais sans mandat de dépôt. Quand vient le tour de son mari, la foudre s’abat sur Patrick Balkany : il écope lui de 4 ans avec incarcération immédiate. Le voilà embarqué sans menottes séance tenante vers la prison de la Santé. Jamais un élu n’a connu un tel sort pour un délit financier. On parle d’une fraude du fisc que les juges évaluent à 11 millions.

'On a voulu se payer Balkany' !!, tonne immédiatement son avocat Éric Dupond-Moretti, qui a annoncé qu’il allait faire appel et déposer une demande de remise en liberté pour son client, notamment pour des raisons de santé.

C’est l’autre coup de théâtre de ce jugement hier : être l'avocat de Patrick Balkany n'est pas un long fleuve tranquille. Éric Dupond-Moretti, l'a appris dès le début du procès. Patrick Balkany avait repris son avocat, devant les caméras, qui s'était trompé sur son âge et avait provoqué la colère de son avocat surnommé 'Acquitator' pour sa capacité à gagner les procès difficiles. L’association du barreau avec le baryton du bon mot n’a pas convaincu le tribunal. Alors maintenant la justice va statuer sur les demandes de la défense. Autant dire que l’affaire n’est pas terminée, car une autre décision de justice est attendue pour le 18 octobre.

"Les juges condamnent aussi un comportement politique qu’ils exècrent chez ces élus triomphants"

Cette fois Patrick Balkany est jugé pour corruption avec le risque d’être condamné à 7 ans de prison. Au-delà du personnage, la justice fait le procès d’une période de notre histoire politique récente, notamment avec le dénouement de l'affaire Cahuzac. Pour rappel, Jérôme Cahuzac, ancien ministre du Budget, a par exemple été condamné en appel en 2018 pour des faits de fraude fiscale, 4 ans d’emprisonnement dont 2 ans avec sursis. Mais il a échappé à l'incarcération : sa peine a été aménagée sous forme de bracelet électronique.

Il était défendu par le même avocat Dupont-Moretti qui avait conseillé à son client de faire connaître sa peur d’aller en prison. Patrick Balkany est hâbleur, truculent et impertinent : entre coups d’éclat et coups de menton, il a imposé sa ligne. Alors les juges condamnent aussi un comportement politique qu’ils exècrent chez ces élus triomphants. Ils condamnent le maillon faible de la génération politique des Hauts-de-Seine des années 1980 et 1990 du siècle passé.

Ces personnalités 'hors-système' installés par Charles Pasqua. Balkany et son ami Sarkozy bousculaient les codes à l'époque, apportant au RPR des mairies jugées imprenables. Avec leur mentor ils ont fait des Hauts-de-Seine un coffre-fort politique et ont donné le sentiment d'être intouchables. En 2007, c'est aussi quelque part les Hauts-de-Seine qui rentraient à l'Elysée avec un président Sarkozy qui pensait un temps à réformer la corporation des juges. La chute de la maison Balkany c'est aussi la fin d'une époque.

"La justice est le personnage inattendu qui grappe à sa façon les trois coups de l'acte 2 du quinquennat Macron"

Par le hasard des agendas, la justice souveraine et indépendante se rappelle au bon souvenir des politiques, et marque les trois coups du quinquennat d'Emmanuel Macron, comme si elle voulait dire qu'elle veut jouer pleinement son rôle dans ce projet. On a vu cette semaine des élus du Modem, dont son président François Bayrou, être entendus par des juges, Richard Ferrand être mis en examen dans l'affaire des Mutuelles de Bretagne, et Jean-Marie Le Pen mis en examen dans le dossier des assistants parlementaires européens.

Nouvel acte du quinquennat et la Justice entre en scène avec un travail lent, méthodique, et avec un autre effet d'optique. Parce que malgré la sévérité des juges à l'égard des politiques et l'obligation de la transparence, les Français dans un sondage, considèrent toujours dans la majorité les élus comme des corrompus".