Le Motel du voyeur de Gay Talese : le livre-reportage d'un journaliste pas comme les autres

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Chaque soir, Nicolas Carreau nous emmène à la découverte des plus belles nouveautés littéraires.

 

Le Motel du voyeur de Gay Talese aux éditions du Sous-Sol.

Nous parlons du livre d’un journaliste pas comme les autres.

Il s’agit de Gay Talese, 84 ans. Il est Américain et il est l’un des fondateurs de ce que l’on a appelé le "nouveau journalisme" dans les années 60-70. C’est un journalisme très littéraire. C’est à la fois, sur la forme, de la pure littérature mais qui raconte une histoire vraie et qui utilise les techniques d’investigation du journalisme. L’un des grands modèles du genre, c’est De Sang Froid de Truman Capote.

Et Gay Talese publie un nouveau livre-reportage, c’est ça ?

Absolument. Ça s’appelle Le motel du voyeur, aux éditions du Sous-Sol. C’est le livre le plus étonnant de cette rentrée littéraire. Gay Talese nous raconte qu’en 1980, il reçoit une lettre d’un homme vivant dans le Colorado, un certain Gerald Foos. Dans sa lettre, l’homme explique qu’il est un incorrigible voyeur. Déjà, à l’adolescence, il observait à la nuit tombée les fenêtres de ses voisins en espérant tomber sur une voisine dénudée. Devenu adulte, il a trouvé un moyen infaillible pour assouvir ce penchant. Il a racheté un motel à Denver et a fait quelques travaux. Il a percé dans certaines chambres un trou dans le plafond et installé de fausses grilles d’aération façonnées de telle manière qu’il puisse observer les ébats de ses clients, depuis les combles, sans être vu.

Et pourquoi le dit-il au journaliste ?

Mais parce que ce monsieur n’est pas seulement un voyeur, il est aussi, selon lui, un fin sociologue. Il prend des notes sur les mœurs et les habitudes sexuelles de ses contemporains. Il est persuadé que ses notes, son journal, peut rendre service à l’humanité. Gay Talese est intrigué et accepte l’invitation de Gerald Foos qui lui propose de venir admirer son installation. Il nous raconte sa visite dans le livre. Le propriétaire du motel l’emmène au-dessus des chambres, Talese est un peu gêné, mais il regarde quand même à travers la grille d’aération. Il voudrait donc écrire un livre qui raconte cette visite mais Gerald Foos, on comprend bien pourquoi, ne veut pas que son nom soit cité. Or Talese a une règle : jamais d’anonyme dans ses reportages. 35 plus tard, Gerald Foos l’a autorisé à donner son vrai nom. Il n’est plus propriétaire du motel. Mais vous imaginez la polémique aux États-Unis. Le journaliste savait mais n’a rien dit ! Le livre arrive en France cette semaine. Talese y raconte tout et publie même des extraits du journal que tenait ce fou de Gerald Foos. C’est incroyable, mais vrai et écrit magnifiquement.

L’incroyable motel du voyeur donc aux éditions du Sous-Sol.