Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
L’écrivain Alexandre Jardin a endossé un combat surprenant et assez peu littéraire: il est en colère contre les ZFE.
Alexandre Jardin, c’est l’auteur à succès de Fanfan, et aussi du zubial et du zèbre. Ce zèbre prolixe est très remonté contre les ZFE. Les ZFE, ce sont les zones à faibles émissions, nées en 2021 de la loi d’orientation sur les mobilités. Le but est de garantir la pureté de l’air des villes en excluant de certains périmètres des voitures jugées trop vieilles et trop polluantes. Depuis le 1er janvier et le raidissement des règles, plus de 10 millions de voitures sont interdites de ces zones. Auparavant, elles concernaient 12 métropoles ( Paris, Lyon)... Et maintenant une grosse quarantaine de villes.
Qu’est ce qu’il leur reproche, Alexandre Jardin, à ces ZFE ?
Il leur reproche d’être “ségrégatives”, stigmatisantes envers les plus modestes, de constituer une catastrophe civique, sociale et économique, de spolier des citoyens de l’usage de la ville. “C'est un acte de guerre, on ne trie pas les voitures, on trie les humains, on trie les travailleurs, on trie les familles”, explique Alexandre Jardin sur son fil X. Il ne l’a pas du tout quitté : il consacre des dizaines et des dizaines de messages chaque jour depuis des semaines à cet unique sujet, les ZFE.
Il a même trouvé un nom pour les relégués de la ZFE,
Il les appelle les Gueux. Il estime que 20 à 26 millions de personnes en France sont concernées, sont devenues gueuses à cause de la loi.
Et il incite les citoyens à se faire entendre, à se mobiliser.
Il a créé un site Internet pour ça : les gueux.fr . Il les incite les « gueux » à rester dignes et à se battre pour leur liberté de rouler. Et aussi à écrire à leur maire sur un modèle de lettre qu’il leur a préparée. On peut y entourer ce qu’on ne peut plus faire à cause des ZFE : emmener son enfant à l’école, se rendre à la gare, rendre visite à ses grands-parents, faire des examens médicaux, etc. “ je n’accepte pas de demander des dérogations spéciales pour entrer dans les villes, je n’ai pas les moyens de payer les PV qu’on m’infligera. Ca suffit de délire, je n’ai pas l’intention devenir un ou une sous-citoyenne cloitrée”, c’est ce qu’on peut lire dans cette lettre.
Ca a des chances de servir à quelque chose ?
Alexandre Jardin fait un pari : que les citoyens vont comprendre en étant confrontés au problème, que les chefs d’entreprise vont se mobiliser. Pour l’instant, ça ne suscite pas de débat politique, mais on a d’autres problèmes qui occupent l’actualité. A part David Lisnard, le président de l’association des maires de France, personne n’en parle de manière très audible.
Mais peut-être que les élus devraient s’y intéresser.
Les messages d’Alexandre Jardin recueillent de vastes audiences. On retrouve les mêmes ressorts que dans l’affaire de la taxe sur les carburants, qui avait engendré les gilets Jaunes. Sentiments de mépris de la part des élites, de relégation, d’un mode de vie menacé et sacrifié sur l’autel d’une écologie mal comprise. On a là tous les éléments d’un cocktail qui peut dégénérer et faire ruer beaucoup de zèbres dans les brancards