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Chaque matin, Roland Pérez évoque une question de droit en rapport avec l'actualité dans Europe 1 Bonjour.

Un commerçant peut-il se voir restreindre dans son activité par son bailleur ?

C’est la question posée au tribunal de Nanterre ce lundi, pour un commerce d’alimentation générale.
Le jugement est très attendu car il s’agit d’un commerçant auquel il est reproché de vendre exclusivement des produits halal alors que la destination de son bail est alimentation générale.

Un commerçant exploitant une supérette s’est vu assigner en justice il y a un an par son bailleur qui n’est autre que l’office de HLM de colombes parce qu’il ne vend ni porc ni vins. Il ne vend principalement que des produits Halal alors que son bail a pour activité "l’alimentation générale". C’est un procès pour le moins singulier. Les explications de Roland Pérez.

C’est une première puisque le bailleur demande la résiliation du bail et donc l’expulsion du commerçant au motif que le critère d’alimentation générale n’est pas respecté, estimant en d’autres termes que l’activité prévue est dévoyée.

Que dit la loi sur ce point ?

Rien de précis sur ce sujet car la définition d’alimentation générale n’est pas donnée par les textes légaux. Il faut aller chercher du côté de l’Insee où l’alimentation générale y est opposée au magasin spécialisé. La tentation de considérer la supérette comme étant un magasin spécialisé peut donc effectivement poser un problème de respect du bail.

Ne peut-on pas considérer que la vente de produit halal est une activité connexe ou complémentaire à celle d’alimentation générale ?

Oui et ce sera aux juges seuls d’apprécier ce point en prenant compte justement ce qu’est invoqué par le commerçant pour sa défense à savoir les désirs et les besoins de la clientèle locale. Mais pour cela, il aurait fallu que le commerçant demande au bailleur ce qu’on appelle une dèspécialisation partielle.
L’avocat de la supérette a certainement plutôt plaidé l’activité accessoire à l’activité d’alimentation générale.

Quel pourrait-être le verdict ?

Il est possible que les juges retiennent un changement d’activité partielle et comme aucune autorisation préalable n’a été donnée, la résiliation du bail pourra être ordonnée. S’il y a un appel de la décision, le commerçant pourra peut-être se conformer à la destination du bail pour permettre à la cour de revenir sur la résiliation. Ce qui est sûr, c’est qu’à l’avenir les bailleurs qui veulent éviter cette difficulté devront spécifier dans une clause expresse la définition de l’activité d’alimentation générale.

Le fait que le bailleur soit une collectivité publique n’est peut-être pas neutre dans le débat puisqu’elle agit dans l’intérêt général ?

Exact car beaucoup d’habitants des environs du commerce se plaignaient de ne pouvoir acheter tous les produits de consommation courante, absents semble-t-il des rayons de la supérette au profit des produits Halal.