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SAISON 2018 - 2019

Ce samedi, Catherine Nay décrypte le rétropédalage de Christophe Castaner sur les événements de la Pitié-Salpêtrière lors du 1er-Mai.

Bonjour Catherine,

Bonjour Bernard, bonjour à tous.

Sale temps pour Christophe Castaner. Pour avoir parlé d'une "attaque" de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière par des manifestants du 1er-Mai, il est accusé par l'opposition d'avoir menti. La gauche demande pêle-mêle sa démission, son audition devant le Parlement, une commission d'enquête. On fait le point.

Le paradoxe, c'est qu'il aurait presque pu triompher de ce 1er-Mai à Paris, si redouté par la Place Beauvau et la Préfecture de police. Le ministre ayant annoncé que 2.000 blacks blocs pourraient être présents, sur le parcours, les riverains tremblaient et se calfeutraient. Or, ça s'est plutôt bien passé. Tout le monde soufflait. Et puis à 20h18, sur BFMTV, Christophe Castaner apparaît, les joues creusées, l'air grave. Il est venu voir le policier qui a reçu un pavé sur la figure. Il savait, bien sûr, que des gilets jaunes avaient forcé une entrée de l'hôpital.

Que dit-il ? "Des gens ont attaqué l'hôpital, des infirmières ont dû préserver le service de réanimation. Nos forces de l'ordre sont immédiatement intervenues". Une déclaration qui a ému l'opinion. Un hôpital, c'est sacré. Et comment ne pas croire le ministre, puisque Martin Hirsch, le directeur général de l'Assistante Publique, qui n'était pas sur place, en a rajouté une louche.  Il apportait son soutien aux équipes qui avaient dû faire face à une bande de casseurs, annonçait qu'il portait plainte. "On est passé au bord de la catastrophe. Sans l'intervention des forces de l'ordre, il aurait pu se produire un drame", dit-il.

Et la directrice de l'hôpital affirmait avoir fait face à une certaine agressivité et violence verbale. La vérité, c'est que tout le monde était effrayé !

Et puis voilà l'affaire qui se dégonfle en quelques heures, et la polémique qui enfle.

Enquête faite, aucun dégât n'a été constaté au service de réanimation, et les manifestants se seraient introduits dans l'hôpital pour se protéger des gaz lacrymogènes. Sur 32 interpellations, seules 2 personnes étaient défavorablement connues des services de police. Le lendemain, toutes les gardes à vue étaient levées. Et l'opposition s'est déchaînée, Jean-Luc Mélenchon en tête, qui traite le ministre de menteur, demande sa démission. Et puis Nicolas Dupont-Aignan fait de même : "il doit partir". Députés et sénateurs socialistes réclament une audition. Le ministre est qualifié de "manipulateur", de "provocateur". C'est sa fête.

Le ministre le méritait peut-être.

Il a fait son mea culpa. Le mot "attaque" était inapproprié, a-t-il dit. Intrusion aurait été plus pertinent. Demeure que casser les verrous pour entrer dans l'hôpital, ce n'est pas anodin. Le ministre est sûrement victime de lui-même, de son tempérament méditerranéen. Il a parlé trop vite. Il a manqué de recul, de sang-froid. Il n'a pas voulu mentir. Il croyait ce qu'il disait, mais il n'était sûrement pas mécontent de jeter l'opprobre sur les "gilets jaunes" : ça fait 24 semaines qu'il est sur les nerfs à cause d'eux.

D'abord, je crois qu'un ministre de l'Intérieur devrait s'abstenir de tweeter. Quand le terrain est aussi inflammable, il ne faut rien faire pour attiser les braises. Donc, quand même, carton jaune.

Cette polémique de la gauche sert aussi à masquer deux échecs du 1er-Mai

Oui, pour la CGT c'est un désastre. Contrairement à ce que dit Mélenchon, il n'y a aucune convergence entre les "gilets jaunes" et la CGT. S'il y en a une, c'est entre les jaunes et les noirs. Philippe Martinez a dû être exfiltré par la police parce que des blacks blocs voulaient lui casser la figure. Il est revenu, mais n'a jamais pu prendre la parole. Ce qui faisait la force de la CGT, c'est son service d'ordre, qui jadis encadrait les manifs, et ça ne moufetait pas sur le parcours. Mais ces gens-là, il n'y en a de moins en moins. Et surtout, les "gilets jaunes" ont cassé l'idée que la CGT était un passage obligé pour revendiquer et s'exprimer.

Et puis les "gilets jaunes" sont toujours là. Mais on ne sait plus qui ils sont. Des révoltés qui fantasment sur une révolution, qui veulent donner libre cours à leur violence, qui applaudissent les blacks blocs. C'est un mouvement sans colonne vertébrale. Ah si, il y aura deux listes des "gilets jaunes" aux européennes. On verra si elles attirent l'électeur.