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SAISON 2017 - 2018, modifié à

Ce samedi, Catherine Nay brosse le portrait du Cavaliere, Silvio Berlusconi.

Bonjour Catherine

Bonjour Wendy, bonjour à tous

Les Italiens votent demain pour renouveler leur parlement. Des élections marquées par une fragmentation politique, un taux élevé d'indécis, une nouvelle loi électorale d'une grande complexité, qui ne garantit pas de majorité stable. L'Italie risque d'être un pays ingouvernable. Et le plus inouï, c'est le retour de Silvio Berlusconi.

Vu de chez nous, on le pensait vraiment hors jeu, compromis dans des scandales à répétition, financiers, sexuels --les soirées bounga-bounga--, fiscaux. Condamné en 2013 à un an de prison pour fraude fiscale, déchu de son mandat parlementaire. En raison de son âge, sa peine avait été transformée en travaux d'intérêt général à l'Hospice de la Sainte Famille, où il est allé tous les jours s'occuper de patients atteints de maladie d'Alzheimer. Il a offert des postes de télévision, couverts les malades de cadeaux, chanté à Noël devant le sapin et la crèche. Il a fait entrer la fête. Tous les EHPAD d'Italie le réclamaient. Un phénomène !
Et puis en 2016, une attaque cardiaque l'a terrassé. Sa carrière, croyait-on, était définitivement close.

Eh bien non... Il réapparaît !

Son retour, début janvier, tient du miracle médical et politique. A 81 ans, l'âge du Pape, il revient sur scène comme neuf : silhouette sanglée dans des costumes bleu nuit de grands faiseurs, sourire plus blanc que blanc, plus une ride, fond de teint pain d'épices; des reflets roux dans ses cheveux plaqués. On voit qu'il n'a pas lésiné sur la chirurgie esthétique. Sa dernière tournée de "vieille canaille" ? Sa condamnation l'empêche de se présenter lui-même jusqu'en 2019. Néanmoins, pour remporter ces législatives, il s'est allié à deux partis d'extrême droite : La Ligue, dirigée par Mattéo Salvini et Les Fratelli d'Italia, les frères d'Italie. Mais qu'ont-ils en commun ? L'immigration étant devenue un enjeu majeur de la politique italienne, les trois veulent renvoyer chez eux les 690.000 migrants, pour l'essentiel des Africains, venus pour des raisons économiques.

Mais beaucoup de sujets les séparent. Salvini est très euro-sceptique, tandis que Berlusconi est allé à Bruxelles pour proclamer sa fidélité à la cause européenne. 
Si leur coalition arrive en tête, comme l'indique les sondages, qui aura le plus d'élus ? Forza Italia, de Berlusconi, ou la ligue de Salvini ? Il est possible que la coalition vole en éclats

Mais pourquoi les Italiens sont-ils toujours aussi fascinés par Berlusconi ?

Le fonds de commerce politique de Berlusconi, c'est un électorat populaire, masculin qu'il faisait rêver. Il avait 58 ans quand il a remporté sa première élection. Il avait tout réussi : magnat de l'immobilier, fondateur d'un empire télévisé, propriétaire de l'AC Milan. Il avait de l'argent, de belles voitures, de belles femmes et encore aujourd'hui, il promène à son bras une jeunesse qui a 50 ans de moins que lui. Il a été président du Conseil à trois reprises, passé 9 ans à la tête de l'Etat italien. Il a du bagout, abuse des blagues salaces. Il est optimiste et ça fait du bien. Pendant cette campagne, il a joué au Père Noël. Il veut instaurer un minimum de vieillesse de 1.000 euros, abolir les droits de succession, créer un impôt unique de 23%, ce qu'il appelle sa révolution fiscale. Pourrait-il tenir ses promesses ? Pas sûr, mais ça fait toujours plaisir à entendre.

Face à lui, il y a le mouvement de 5 étoiles, toujours en tête des intentions de vote mais qui ne pourrait gouverner faute d'alliance. Et Mattéo Renzi, ex enfant prodige du parti démocrate, le réformiste qui voulait tout changer et qui n'est resté que deux ans au pouvoir

Au fond, l'establishment italien compte sur Berlusconi pour le débarrasser de Beppe Grillo. Le leader du mouvement 5 étoiles, l'amuseur ébouriffé, tonitruant, qui est leur bête noire même s'il présente à sa tête un jeune homme de 31 ans, Luigi di Maio, bien peigné, costume cintré, un parler d'énarque qui veut gouverner. Plus question de faire sortir l'Italie de l'Europe. Alors que Beppe Grillo rejetait tous les partis, lui verrait bien, a contrario, une alliance mais avec qui ? Mystère 
Quant à Matteo Renzi, il a laissé un mauvais souvenir. Il a voulu réformé à la hussarde, en passant par-dessus les corps intermédiaires. Il a humilié ses adversaires, personnalisé et médiatisé sa politique à outrance. Les Italiens n'en veulent plus.Au fond, une seule chose est sûre : l'ère Berlusconi n'est pas finie. Tant qu'il vivra, il sera là il fait partie du paysage.