Les Verbatims : une nouvelle manière de raconter l'information politique

Le fait média du jour, Jérôme Ivanitchtenko 29.02.2016 1280x640 5:02
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La série politique de France 2, Les Verbatims, rejouent des scènes qui se sont déroulées loin des caméras et des micros.

Le fait média du jour, c’est Les Verbatims, diffusés hier dans 13h15 le dimanche, sur France 2. Une série politique où des comédiens rejouent des scènes qui se sont déroulées loin des caméras et des micros. Une nouvelle manière de raconter l’information politique qui a divisé les internautes.

Un véritable ovni télévisuel :

Un format qui s’apparente à ce qu’on appelle la "scripted réalité", un programme qui mélangeait fiction et réalité pour reconstituer un événement et en l’occurrence, un événement politique.
Hier, pour le lancement de cette série de docu-fiction, France 2 s’intéressait à la préparation de la primaire de la droite et du centre.
La séquence démarre par l’incrustation à l’écran d’un avertissement qui explique que "si les scènes de fiction sont librement inspirées de la réalité, les propos, quant à eux, sont authentiques."
S’ensuit alors, pendant plus d’une ½ heure, une succession d’allers-retours entre de vraies images de l’événement et des séquences reconstituées. Une mise en scène où les différents protagonistes sont cette fois incarnés par des comédiens. Dans la séquence que vous allez entendre, on voit ainsi le faux Nicolas Sarkozy s’adresser à ses lieutenants après le Conseil national des Républicains le 13 février dernier.

L’imitation est un peu forcée :

Autour du faux Nicolas Sarkozy, on trouve donc Bruno Le Maire, Alain Juppé, François Fillon, Nadine Morano et Nathalie Kosciusko-Morizet, eux aussi joués par des comédiens.
La base, les ingrédients qui nourrissent ces échanges entre eux, ce sont les "off", ces moments où les micros et les caméras ne tournent pas, mais que des journalistes parviennent tout de même à recueillir. Une matière qui n’apparait habituellement jamais aussi explicitement dans la presse.

D’autres séquences ont aussi retenu notre attention :

Notamment certaines scènes parfois très caricaturales. Par exemple, chaque protagoniste fait l’objet d’une rapide biographie en images et notamment Nathalie Kosciusko-Morizet.
Cette phrase, "J’aime fumer des cigarettes avec des SDF", NKM ne l’a jamais prononcée. Elle fait référence à une photo qui avait été diffusé lors de la campagne pour la mairie de Paris et qui avait provoqué de nombreuses réactions et que les scénaristes mettent donc dans la bouche de la probable candidate à la primaire pour la décrire. Une petite liberté avec la réalité.

Autre séquence un peu gênante, cette conversation téléphonique rejouée entre Nadine Morano et un journaliste.
Cette fois, c’est un "off" de Nadine Morano qui est révélé et la source, on imagine bien sûr qu’il s’agit du journaliste qui avait Nadine Morano au téléphone ce jour-là.

Un genre de récit original mais qui est loin de faire l’unanimité :

Sur les réseaux sociaux, beaucoup ont salué l’originalité de la démarche, qui permet de voir ce qu’on ne voit pas, d’entendre ce qui reste généralement des "propos rapportés".
D’un autre côté en revanche, ils ont été très nombreux à trouver que les imitations semblaient parfois grotesques et que, surtout, ce docu-réalité constituait un grave mélange des genres. Beaucoup de responsables politiques se plaignent de la tentation de l’infotainment, de la mise en scène, préjudiciable, de l’actualité politique. De nombreux téléspectateurs sont aussi de cet avis face à ces "Verbatims". Une séquence qui n’aurait pas sa place sur le service public.

France 2 avait déjà expérimenté ce type de récite hybride, ce mélange de réalité et de fiction. En novembre 2014, la chaîne avait reconstitué le bureau politique de l’UMP qui avait conduit à la démission de Jean-François Copé de la présidence du parti.
Pas sûr que les critiques qui pleuvent ce matin sur cette nouvelle séquence soient suffisantes pour décourager France 2 de rééditer l’expérience.
Dimanche prochain, elle devrait cette fois s’intéresser au Parti socialiste.