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Chaque jour, Marion Lagardère scrute la presse papier et décrypte l'actualité.

Dans la presse ce matin, c’est déjà le 1er mai.

Jour férié oblige, vos journaux, qui pour beaucoup ne paraitront pas demain, anticipent : le rendez-vous est donc en Une de beaucoup d’entre eux, sur fond évidemment de mouvement social.

Et là-dessus, rien de neuf.
L’Opinion et le Figaro grognent contre "la grogne : car non, les barricadiers de mai 2018 ne sont pas la voix du peuple", écrit Vincent Trémolet dans son édito, parlant de "rentier de la mobilisation".
"Leur vrai métier, faire la grève", titre Capital qui publie littéralement un tableau de chasse des syndicalistes français. Nom, prénom, entreprise : trombinoscope des coupables. "À la SNCF, par exemple, Erik Meyer, de Sud Rail, a contribué à faire annuler 250 train sur le RER A", pire ! "Jacques Eliez de la CGT RATP impose le maintien de 4.000 salariés, écrit le magazine".

Capital qui nous dit pourtant que "la France n’est plus championne des grèves".
Faudrait savoir, les syndicats sont à la fois trop puissant et petits bras.

Une chose est sûre, "Il n’y aura pas de grand 1er mai de la rue", affirme la Montagne. "Le défilé sera la démonstration d’une désunion", ajoute les Dernières Nouvelles d’Alsace.
Ce à quoi la Une de Libération répond : "même pas morts", avec la photo du trio syndical, Berger, Pavageaux, Martinez.
L’Écho de la Haute-Vienne parle d’un "1er mai couleur lutte", le Courrier Picard juge que "le printemps sera chaud", et l’Humanité prédit une journée "de convergence de toutes les luttes en cours".

Sinon, entre les deux, il y a le reportage de la Croix, qui donne la parole aux salariés de la SNCF, gréviste et non-grévistes. Véronique par exemple, qui travaille aux ressources humaines, et qui pointe "des regards de haine de la part des grévistes". Et puis Julien, référent train, qui lui voit la haine ailleurs, comme cette insulte entendue sur le quai à Arras, sur "ces enfoirés de cheminots privilégiés".
Privilègié, Loïg, aiguilleur, 1.400 euros par mois.
Joshua, conducteur, 2.500 euros. Gréviste, il perd 500 euros sur son salaire d’avril.
"On a dit trop de contre-vérité sur nos métiers, regrette Nicolas, agent en gare, certes, nous avons des avantages, mais nos salaires sont plus bas que ceux des catégories socioprofessionnelles équivalentes, moi je n’ai pas envie que les générations futures voient reculer leurs conditions sociales".

Autant de points de vue à lire donc dans La Croix. Pour un sujet effectivement un peu plus subtil qu’une simple histoire de "grogne".

D’ailleurs la France ne va pas si mal ! C’est en tout cas le point de vue du New York Times.

Édito signé Roger Cohen, complètement sous le charme d’Emmanuel Macron et qui revient sur sa visite à Washington.

"J’ai longtemps vécu dans une France où rien n’était possible, écrit-il, un pays qui résistait au changement. Le mot "flexibilité" était suspect, et voilà que, sortant de nulle part, est arrivé "monsieur flexibilité" : il est jeune, il est dynamique, et son nom, évidemment, est Emmanuel Macron".

C’est impressionnant et d’autant plus surprenant que le principal intéressé n’est pas rentré en France avec grand-chose, rien sur l’accord de Paris pour le Climat ni sur le nucléaire Iranien.

Sauf que, pour Roger Cohen, notre président contraste nettement avec le sien ! Macron est "rafraichissant, écrit le journaliste, il parle anglais, et il pousse Trump hors de sa zone de confort (…) il est une sorte de contrepoids à l’OVNI qui a atterri dans le bureau ovale". Rien que ça.
Voilà, encore une fois, tout dépend de quel point de vue on se place : vue de France ou vue des États-Unis, vu du bureau d’un grand journal ou vu des réseaux sociaux.
Parce que dans ce déplacement, il y a eu aussi ces images dont ne parle pas Roger Cohen : Trump tirant Macron par la main, les deux s’embrassant à de multiples reprises, l’américain épouillant les pellicules sur le costume du français.

Vu sous cet angle, écrit Daniel Schneidermann dans Libération, "le gamin ravi qui accepte de se faire épousseter les pellicules par Trump peut-il être, en même temps, le leader mondial de la résistance au trumpisme ? Il est à craindre que non".
La faute, d’après Libé, à la force de frappe des réseaux sociaux.

La force des réseaux sociaux et plus généralement des Gafa qui font encore débat dans la presse ce matin.

La Une des Échos pose la question de leur régulation : "taxation des Gafa : le projet français divise les européens", le journal revient sur la réunion qui s’est tenue samedi à Sofia entre les Ministre des Finances, repartis sans consensus.

Et puis le Figaro vous met en garde : "ce qu’Internet sait de nous".
Où l’on comprend que, que l’on soit prudent ou non, une navigation totalement protégée sur le web est impossible. Rien de neuf me direz-vous. Oui, mais on en apprend tout de même sur la méthode.
"Par exemple, même si vous supprimez les cookies, prévient le journaliste Didier Sanz, n’importe quel site peut savoir, quand vous accédez à ses pages. De même pour Google qui collecte vos recherches, ou Twitter, qui saura sur quels sites vous cliquez pour partager une information.

Mais le plus surprenant dans l’article c’est peut-être le paragraphe sur Facebook qui, même si vous n’avez pas de compte, parvient tout de même à récolter des informations sur vous.
C’est un peu technique, mais ce sont ses logiciels traqueurs, intégré aux pages web, qui lui permette de savoir où vous surfez, ce que vous lisez, un sujet d’autant plus épineux, écrit le journal, que ces internautes non-inscrits sur Facebook n’ont aucun moyen de demander la suppression de leurs données".

Une revue de pistages, à lire donc dans le Figaro.
Enfin, "rien de neuf", c’est le défi que s’est lancée une journaliste du Monde, on parle de consommation.

Quatre mois après avoir décidé de ne "rien acheter de neuf pendant un an", la chroniqueuse Guillemette Faure énumère réussites et échecs : "par exemple, le bonnet de bain pour la piscine. Bon là, écrit-elle, il a fallu en acheter un".

Mais dans l’ensemble, elle s’en sort plutôt bien : parce que du web aux vides-greniers, "on découvre que tout se trouve en seconde main, se répare, se prête (…) bien sûr les semelles qui décident de se décoller ou le collant qui file, sur le coup, c’est très contrariant, mais quand vous réussissez à réparer ou à emprunter, dit-elle, vous vous retrouvez à jubiler comme si vous veniez de hacker tout le système !".

Guillemette Faure qui précise qu’elle continue d’acheter journaux et livres neuf, "pour continuer à soutenir la presse et l’édition. Mais si j’avais été menuisier, dit-elle, peut-être aurais-je épargné les tables et tabourets ?".

Et oui, quelle est la limite au principe du rien de neuf ?
Réponse sur la page Facebook des adeptes du "rien de neuf", la limite, ce sont les sous-vêtements : "une personne dit avoir tenté d’en coudre elle-même, une autre n’en porte plus", écrit le journal.
Voilà, le recyclage s’arrête au caleçon et au soutien-gorge.
Conclusion : l’idée n’est pas "de mettre l’économie à terre, mais d’avoir une réflexion, de se poser la question : est-ce que j’en ai vraiment besoin ?".

Un article pour interroger ses réflexes et éventuellement les remettre à neuf, à lire sur leMonde.fr.

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