Maude Vercini : "Un coup monté pour m'enlever mes enfants"

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"La visite de François Hollande au Mexique cette année est mon seul espoir", confie Maude Vercini.

Voici ses déclarations :

 

Quand avez-vous pour la dernière fois Adrian, Sofia et Alexis ?

"La dernière fois que j'ai vu mes enfants, c'était le 15 décembre 2011, à Paris. Nous avons fêté Noël en famille, comme d'habitude, toujours un petit peu avant qu'ils ne partent au Mexique, passer les vacances de Noël avec leur père."

Qu'est-ce qu'il s'est passé, ensuite ?

"Ils sont partis, 15 jours, et le 1er janvier, leur père m'appelle pour me dire que les enfants ne rentreraient plus jamais en France et qu’il les gardait désormais avec lui au Mexique."

Leur père, c'est Arturo Montiel, ancien gouverneur de Mexico, homme politique très puissant au Mexique. Vous avez vécu 6 ans avec lui. Le jour où il a décidé que vous ne verriez plus vos enfants, qu'est-ce qu'il vous a dit, précisément ?

"Il m'a dit : "J'ai su par les nounous que vous - mon mari et moi - maltraitiez mes enfants."

Parce que vous vous êtes remariée.

"Oui, je me suis remariée. J'ai une petite fille. Et donc il a prétendu que mon mari et moi maltraitions mes enfants, qu'ils subissaient des sévices et que par cette occasion, ce coup de fil, il m'annonce : "Je viens de réaliser cela donc je ne t'enverrai plus les enfants, c'est moi qui les garde." "

A cette époque-là, il vous a piégé pour enlever les enfants. Comment s'y est-il pris ?

"Alors en fait, c'est un coup monté. Il faut bien comprendre que cela faisait 4 ans qu'il préparait cet enlèvement. Pendant 4 années, il m'envoyait des nounous mexicaines, par deux. Il prétendait que c'était primordial pour lui que les enfants continuent à parler espagnol. Et surtout, il trouvait que c'était beaucoup plus simple, quand les enfants retournaient le voir au Mexique pendant les vacances scolaires, puissent être amenés par ces nounous mexicaines."

Donc, vous lui avez fait confiance.

"Je lui ai fait confiance. C'était quelque chose qui était important pour lui. Il me l'a demandé comme une faveur au moment où nous avons divorcé. Nous étions en très bons termes à l'époque, je n'y voyais aucun inconvénient. Je n'avais rien à me reprocher et justement, je pensais que c'était plutôt bien qu'il y ait ce climat de confiance entre le père et moi. Et puis voilà : ila eu les témoignages qu'ont fait les nounous successivement. Il a eu cinq témoignages de nounous, payées et choisies par lui évidemment. Et ces nounous qui ont toutes prétendu que nous maltraitions nos enfants."

A cette époque, vous viviez à Paris avec vos enfants. Ils voyaient leur père plusieurs fois par an au Mexique. Il y a eu malgré tout une première alerte en 2007. Comment on peut dire ? Une première tentative d'enlèvement ?

"Oui, il y a eu un premier enlèvement en 2007. Les enfants sont partis avec leur père en Espagne pour des vacances. Il me les a réclamés au mois de juillet. Je lui ai dit oui, donc les enfants devaient partir 10 jours dans le sud de l'Espagne. J'avais envoyé une jeune fille au pair française qui les gardait. Trois jours après leur arrivée, elle m'a appelé, catastrophée, un matin, à 7 h, en me disant : "Madame, il n'y a plus personne, la maison est vide. Ils sont partis dans la nuit." Il était parti en pleine nuit avec les enfants au Mexique sans dire un mot en laissant 100 € sur la table de nuit de la nounou." J'avais saisi à l'époque tout de suite l'autorité centrale française, le ministère de la Justice, pour signaler cet enlèvement. Une procédure avait commencé à se mettre en place, mais très vite, il a eu peur d'être inquiété et il m'a rendu les enfants un mois après. Mais je suis resté quand même sans nouvelle de mes enfants pendant un mois plus tard."

Ça, c'était en 2007. En 2011, il y a l'enlèvement à proprement parler. Depuis, vous ne les avez pas vus. Quels liens, malgré tout, avez-vous avec vos enfants ? Est-ce que vous pouvez leur parler ? Comment ça se passe ?

"Au début, j'appelais les enfants tous les jours, plusieurs fois par jour. Le père consentait à me les passer au téléphone une fois tous les 15 jours, trois semaines. Et puis, au fur et à mesure que le temps passe, il me les a passés de moins en moins. En fait, il me punit  quand je fais une interview, surtout au Mexique."

C'est-à-dire que vous savez quand faisant cette interview ce matin, vous savez que vous allez être punie d'une certaine manière ?

"Médiatiser, pour lui, c'est terrible, parce qu'on le montre du doigt et ça ne lui plaît pas. Du coup, il a contre-attaqué, et à chaque fois que je médiatise, il me punit en ne me passant plus mes enfants. Il y a eu des époques où je n'ai pas eu mes enfants pendant plusieurs mois. Aujourd’hui, en gros, je les ai une fois par mois, un appel de deux minutes."

Vous y êtes allée il y a 15 jours maintenant.

"Le 16 décembre, j'ai eu un droit de visite."

Vous deviez les voir, qu'est-ce qu'il s'est passé ?

"Enfin, après deux ans - j'ai toujours supplié les juges et les magistrats de me laisser un accès à mes enfants, ce qui est archi-normal, ce sont mes droits et ceux des enfants de passer du temps avec la maman – donc, après la deuxième occasion, on m'a laissé un droit de visite de deux heures. Deux heures, quand vous habitez à Paris, à 12 heures de vol, c'est quand même peu, c'est maigre."

Mais vous avez quand même pris l'avion.

"J'ai quand même pris l'avion. C'est la 10e visite que je faisais au Mexique, et une fois de plus, les enfants ne se sont pas présentés, c'est-à-dire que mon ex-mari n'a pas emmené les enfants dans le centre de médiation où nous avions rendez-vous. C'est cauchemardesque d'arriver, pensant voir vos enfants, avec des sacs remplis de cadeaux, et de vous retrouver sur le perron du centre en attendant et en voyant personne arriver. C'est vraiment très dur."

A ce moment-là, avez-vous un quelconque moyen de pression sur lui ? Que vous répond la justice mexicaine ?

"Rien. Silence radio. C'est très bizarre, parce que ce droit d'accès aux enfants, ça fait deux ans que je le réclame. Je n'ai aucun moyen de pression. Et le pire, c'est que s'il ne présente pas les enfants, il n'y a aucune amende pour le père. Il n'est pas inquiété s'il ne présente pas les enfants. Je n'ai aucun moyen de pression."

En clair, la justice mexicaine ne peut pas ou ne veut pas vous aider. Est-ce que la justice ou les autorités françaises ne peuvent pas faire quelque chose ?

"Ecoutez, c'est difficile. Bon, il y a une convention, la convention internationale de La Haye signée entre la France et le Mexique dans les années 80. Les autorités françaises, malheureusement, sont un petit peu pieds et mains liés, parce qu'on dépend évidemment de la justice mexicaine. Simplement, je considère que, dans une procédure qui est censée durer 6 semaines, d'après ce que dit la convention internationale de La Haye pour une restitution d'enfants suite à un enlèvement, on en est à 2 années. Ça fait 2 années que j'attends un accès à mes enfants. Un retour de mes enfants : il y a eu bel et bien un enlèvement. Personne ne fait rien."

Quels espoirs vous avez pour 2014 ?

"2014 : il y a une visite du président François Hollande au Mexique, et c'est vrai que tous mes espoirs reposent sur cette visite."

C'est à lui que vous vous adressez ce matin ? Qu'est-ce que vous voulez lui dire ?

"Je veux lui dire que c'est un père de famille avant toute chose et qu'il ne peut pas laisser une maman sans voir ses enfants pendant plus de deux ans. C'est ignoble. Deux ans, on se rend pas compte. Mais je vous assure que si vous fermez les yeux et que vous vous imaginez deux ans sans vos enfants, ça fait vraiment mal. Les nuits sont longues, le temps passe très lentement... Voilà, ma vie est un cauchemar."

Merci, Maude Versini. On espère évidemment que vous pourrez revoir vos trois enfants très très vite et on prendra régulièrement de vos nouvelles sur Europe 1.

"Merci pour votre écoute."