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François Clemenceau revient chaque matin sur un événement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

Le gouvernement américain a décidé d’adopter de nouvelles sanctions contre le Venezuela après la réélection du président Nicolas Maduro. Et cela n’émeut pas grand monde. 

Le ministère vénézuélien des affaires étrangères a publié hier un communiqué pour dénoncer je cite « un lynchage politique et financier » de la part des Etats-Unis qu’il compare au Ku Klux Klan et assimile à un crime contre l’humanité. Pourtant, les mesures prises par les Etats-Unis contre le Venezuela ne pénalisent pas la population mais la totalité des ministres du gouvernement de Nicolas Maduro, quelques dizaines d’autres personnalités liées au régime et à ses compagnies nationales. En revanche il est bien question à Washington d’envisager un embargo sur le pétrole vénézuélien, ce qui risque de porter un coup fatal au pays dans la mesure où Caracas exporte un tiers de son brut vers les Etats-Unis. Mais si la situation du pays est catastrophique sur le plan économique, social et humanitaire avec des centaines de milliers de personnes qui ont déjà fui vers les frontières brésilienne et colombienne, c’est parce que le gouvernement Maduro n’a pas su ou pas voulu diversifier son économie quand il était encore temps. Lorsqu’on a une économie dépendante à 96% du pétrole et que le prix baisse de moitié, pas étonnant que la crise soit au rendez-vous. C’est en grande partie ce qui explique les 13.000 % d’inflation, les pénuries, et le fait qu’un salaire moyen aujourd’hui suffit à peine à s’acheter un kilo de farine.

Maduro est en plus isolé, alors que son prédécesseur Hugo Chavez l'était beaucoup moins

Il n’y a qu’à voir les communiqués de félicitations que Maduro a reçus. De la Chine de la Russie, de la Turquie, de Cuba, de Bolivie et du Nicaragua, que des dictatures à une exception près. Rien à voir avec la solidarité minimale que tous les grands pays du monde, notamment en Europe, mettent en œuvre avec Cuba. C’est pour cela que l’on ne peut pas comparer les deux situations, celles qui règnent depuis trois ans à Caracas et depuis plus de 30 ans à la Havane.

Pourquoi ?

Parce que l’embargo américain contre Cuba n’a fait qu’appauvrir un pays qui était déjà pauvre et qu’il y avait donc là quelque chose de cruel. Je prends juste un exemple : en 2013, c’est-à-dire bien avant le début de cette crise politique qui a dégénéré en tragédie humanitaire, le revenu brut moyen par habitant à Cuba était de 6570 dollars alors qu’il était de 11760 au Venezuela, près du double. C’est un pays bien plus riche qui a été sanctionné. On a le droit d’être contre les sanctions sur un plan philosophique ou pour estimer que cela ne fait que radicaliser la donne. Mais si aujourd’hui l’Union européenne applique également des sanctions contre le régime Maduro alors qu’elle les a levées contre Cuba il y a déjà dix ans, malgré sa politique des droits de l’homme, cela prouve qu’au Venezuela, on a atteint un degré rarement atteint dans la violation des droits démocratiques.