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François Clemenceau revient chaque matin sur un évènement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

La grand-messe de la sécurité en Asie commence

C’est aujourd’hui et jusqu’à dimanche que se tient à Singapour le Forum Shangri-La. Il s’agit d’une sorte de Davos de la défense asiatique. Et on va évidemment cette année y parler de Corée du Nord. 

Quand on vous dit Shangri-La, les plus anciens se souviendront peut-être du roman de James Hilton "Le paradis perdu", mais ceux qui voyagent savent qu’il s’agit aussi d’une chaine d’hôtels de luxe et là en l’occurrence, c’est un peu des deux. Chaque année depuis 2002, c’est à l’hôtel du même nom sur l’une des collines de Singapour que se réunit le gratin de la défense, de la sécurité et du renseignement de 28 pays de la région Asie-Pacifique, mais aussi par extension tous ceux qui y sont impliqués ou souhaitent y jouer un rôle, : les États-Unis depuis le début, mais aussi les Européens et la France depuis 2012. Alors oui, on y évoque l’actualité dans des discours et des tables rondes mais en coulisses, on se voit discrètement et on dialogue. Il se trouve qu’on sera ce week-end à dix jours du sommet entre Trump et Kim sur la dénucléarisation de la Corée du Nord et que cette rencontre aura lieu également à Singapour. Pour l’instant la séquence préparatoire à New York entre le chef du renseignement nord-coréen et le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo se passe bien, mais tous les militaires de la région ont envie d’en savoir plus pour anticiper, notamment les ministres de la défense de Corée du Sud et du Japon qui seront là au Forum avec des délégations très fournies.

Mais ce ne sera pas le seul sujet pendant ces trois jours de travaux.

L’autre grand dossier, c’est la militarisation de la mer de Chine. Il y a trois ans, lorsque j’avais été au Forum, le sujet était déjà abordé et on évoquait ouvertement la polderisation des iles de Mer de Chine qui sont revendiquées par une demi-douzaine de pays. Trois ans plus tard, ils ont tous été ou presque, notamment dans les iles Spratleys et Paracel, militarisés, autrement dit dotés d’une piste d’atterrissage, de batteries de défense anti-aérienne et de missiles sol-mer, bref de petites forteresses qui visent à dénier l’accès des eaux environnantes. Deux colonels et un général chinois viendront à Singapour ce week-end pour défendre cette stratégie dissuasive tandis que les voisins de la Chine, les États-Unis et ses alliés européens (dont la France) s’engageront à faire respecter le droit international de la libre navigation. Y compris en faisant circuler lors propres bâtiments de guerre à proximité de ces archipels. On est là dans un bras de fer au cœur d’une zone vitale pour le commerce mondial.

Avec des chiffres qui donnent le vertige.

Pour vous donner une idée du rapport de forces, la Chine a dépensé l’an dernier pour sa défense, 228 milliards de dollars, c’est trois fois moins que les États-Unis mais c’est sept fois plus que la France et trois fois et demi plus que l’Inde, le grand géant qui est de retour avec un budget militaire qui a doublé en dix ans et dont le premier ministre Narendra Modi sera le seul chef d’État étranger présent au Forum de Singapour.