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François Clemenceau revient chaque matin sur un événement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

Comment aider les Syriens sans aider Bachar el Assad ? C’est à cette question que les grands pays de la planète doivent répondre depuis hier à Bruxelles. Et c’est loin d’être simple.

 

 

C’est la troisième année que la conférence internationale d’aide à la Syrie se réunit, et l’exercice est à, chaque fois, de plus en plus délicat. Les chiffres sont en effet de plus en plus effroyables. Rien que depuis le début de l’année, 700.000 syriens ont été déplacés en dehors de leurs villes ou villages du fait de la guerre. Ils s’ajoutent aux 6 millions de leurs compatriotes qui, eux aussi, ont dû quitter leur lieu d’habitation pour aller se réfugier ailleurs en Syrie. Chiffre auquel il faut ajouter les 5 millions de syriens réfugiés à l’étranger (en Turquie, en Jordanie, au Liban et en Europe). Et surtout aux 250.000 autres qui sont encore en Syrie mais qui sont assiégés dans leur propre ville, et donc, condamnés à mourir, à se rendre et en attendant à vivre dans des conditions innommables.

 

Quelle a été la réponse apportée par les deux dernières conférences à ce sujet ?

 

 

Pas grand-chose mais pas forcément par mauvaise volonté. Les pays donateurs qui sont rassemblés à Bruxelles savent qu’il faut réunir cette année 7 milliards et demi d’euros pour soulager l’ensemble de ces syriens sur le plan humanitaire. Mais les deux tiers de l’aide vont d’abord aux réfugiés qui sont à l’extérieur de Syrie. Pour ceux qui sont à l’intérieur, rien ne serait pire que l’aide soit détournée pour aider le régime de Bachar el-Assad ou pour faire perdurer les sièges et les rapports de force militaires sur le terrain. La Syrie n’a pas été invitée à cette conférence de Bruxelles et personne n’attend vraiment de ses deux alliés, la Russie et l’Iran, de participer à cet effort humanitaire causé par une guerre dont ils sont en grande partie responsables.

 

En fait, si je comprends bien, le tabou ici c’est de parler de solution politique ?

 

Non, ce n’est pas tabou. Hier, on a parlé essentiellement humanitaire et donations mais aujourd’hui on parlera de politique. Mais là où vous avez raison, c’est que personne ne veut mettre le doigt dans un engrenage qui cautionnerait le régime de Damas et ses alliés. Exemple : tout le monde sait qu’il faudra bien un jour partager, non pas forcément la carte, mais au moins le pouvoir : entre le régime, les Kurdes et une partie de l’opposition sunnite. Sauf que si l’on commence à anticiper ce processus en commençant à reconstruire le pays en pensant que cela va le faciliter ou l’accélérer, c’est peut-être tout le contraire qui va se passer, le régime n’attendant plus que la reconstruction commence pour asseoir plus facilement son contrôle. Comme le disait hier le patron du Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU, « il s’agit là de la plus grande crise du monde et de l’un des plus grands échecs du début du XXIème siècle ».