2:52
  • Copié

Alors que le débat sur l'extension de la PMA devait être au cœur de l'actualité, la mort de Jacques Chirac l'a finalement fait passer au second plan.

La vie politique est suspendue, pendant toute la journée de deuil, et elle ne reprendra que ce mardi avec la suite des débats sur la loi bioéthique.

La mort de Jacques Chirac a écrasé tout le reste de l’actualité. C’est un phénomène assez classique : dans la grande roue médiatique, une info n’a d’importance que dans la mesure où elle n’est pas dépassée par une autre plus écrasante.

Dans notre jargon, on appelle ça la hiérarchisation de l’information.

Et c’est en vertu de ce principe que l’on a assez peu parlé de la catastrophe de Rouen. En "temps normal", toutes les Unes de la presse se seraient certainement concentrées sur l’incendie de l’usine de Lubrizol. Et c’est la même chose pour les débats sur la loi bioéthique. Le vote, juste avant le week-end, de l’article premier de ce projet de loi, celui qui ouvre la voie à la PMA pour toutes les femmes, y compris les femmes seules, est passé presque inaperçu.

Il y a quand même eu une polémique à l’Assemblée.

Mais là aussi c’est très instructif. C’est le vote d’un amendement qui a provoqué cette tension. Que dit-il ? Que la PMA "est destinée à répondre à un projet parental". "Projet parental", c’est cette expression que conteste une partie des députés pour qui cette formulation très générale légitime la PMA pour les couples d’hommes qui auraient un "projet parental". C’est donc, selon eux, la porte ouverte à la GPA. Le vote de ce texte a eu lieu, dans des conditions rocambolesques. Et pourtant, le président de l’Assemblée n’a rien voulu savoir. Il n’a pas remis en cause son comptage.

Fin de l’épisode ? Il n’y aura pas de suite ?

Pas pour l’instant. Là aussi, la polémique a été écrasée par l’actu de la mort de Jacques Chirac. De sorte que la plus grande réforme sociétale du quinquennat Macron a été adoptée presque en catimini. Alors, naturellement, on doit se féliciter que le chef de l’Etat ait bien pris soin de ne pas rouvrir la fracture que François Hollande avait creusée avec le mariage pour tous. Les débats ont été courtois, souvent techniques, parfois teintés des expériences personnelles de certains parlementaires, nés de PMA ou enfants adoptifs, ou ayant eux-mêmes eu recours à la PMA. Mais la rue n’a pas bougé, les manifs sur le climat et les Gilets jaunes occupent le pavé. C’est un peu comme si la société française n’avait pas pris conscience de ce bouleversement.
C’est à se demander si, à force d’être dépassionné, le débat sur la création de cette nouvelle frontière du vivant n’a pas été un peu trop escamoté. Si cette ambiance amortie, ce débat anesthésié, n’est pas une autre façon de dévaloriser la démocratie.
Personnellement, Nicolas Beytout craint que oui.