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Plus de 100 jours après sa prise de fonction aux Etats-Unis, Joe Biden continue de fasciner les politiques français, notamment à gauche. Ses décisions, notamment sur le plan économique, en font rêver certains dans un pays où la culture de la dépense publique est très ancrée.

Vous êtes frappé par le concert de louanges qui entoure, en France, l’action de Joe Biden.

Oui, c’est curieux, cette fascination pour ce nouveau Président des Etats-Unis : climat, Iran, tout ce qu’il fait semble relever de l’exploit, tout ce qu’il dit fait de lui un génie politique. Un peu de calme, donc, un peu de recul. Car même si Joe Biden bénéficie en positif de la comparaison avec Donald Trump, son prédécesseur tellement détesté en France, tout ce qu’il entreprend ne serait certainement pas la solution à nos problèmes français.

Ce qui est sûr, c’est que ses cent premiers jours ont été marqués par un vrai succès de la campagne vaccinale.

C’est vrai, et sa popularité vient largement de là : ce qu’il a mis en place relève effectivement d’un exploit logistique et, pour le coup, on aimerait beaucoup avoir la même performance en France. Mais pour le reste, sur les autres dossiers qui sont en haut de la pile à la Maison Blanche, c’est beaucoup plus complexe. 

Par exemple pour les finances publiques ? 

Oui, pour les gigantesques plans de relance : un premier de 1.900 milliards de dollars, adopté dès son installation au pouvoir, et maintenant deux plans de plus, l’un 2.300 milliards de dollars pour reconstruire et moderniser l’équipement du pays, et 1.800 milliards d’aide à l’enfance et à la famille. Soit plus de 6.000 milliards de dollars, des sommes tellement élevées qu’elles ont commencé à faire tiquer même dans le camp démocrate. Qui hésite déjà à les voter.

Eh oui, parce que si, en France, on a la culture de la dépense publique, aux Etats-Unis, dans un pays qui est lui-même ultra-endetté, on se préoccupe quand même de savoir comment rembourser. Alors bien sûr, pour rembourser, il y a les impôts.

Que Joe Biden veut augmenter.

Oui, ce qui met en joie les théoriciens français du toujours plus de taxes. Ce qui est vrai, c’est que Joe Biden veut augmenter la pression sur les sociétés, en proposant au passage de fixer un taux mondial de l’impôt sur les bénéfices à 21%. Applaudissements en France, où on oublie que nos entreprises sont plutôt taxées à 28% et qu’il ne faudrait donc pas augmenter mais réduire notre impôt sur les sociétés.

Et c’est la même chose pour la taxation des riches. Le Président américain veut relever l’impôt des grandes fortunes, ce qui, là aussi, met en joie la gauche française et lui redonne une occasion de plaider pour le rétablissement de l’ISF. C’est un vieux réflexe, chez elle, aussi vieux que l’élection de Mitterrand : il faut taxer les riches. Sauf que Joe Biden ne veut absolument pas d’un ISF, mais d’une augmentation de l’impôt sur le revenu. Et pas dans des proportions à la française, non, il s’agit de revenir au niveau qui était celui fixé par George W. Bush, pas précisément un gauchiste anti-riche.

La France est un des pays développés où les inégalités sont les moins fortes, les Etats-Unis un continent où elles sont les plus fortes. Les réduire là-bas, c’est bien, en conclure que la France serait en retard et devrait se mettre à la remorque de cette nouvelle idole du partage, c’est tromper les Français.