Apprentis 1280 3:30
  • Copié
Olivier Samain, édité par Romain David
C'est un paradoxe accentué par la réforme de l'apprentissage : la hausse sensible du nombre d'apprentis complique les recrutements, tandis que certaines entreprises assurent ne pas parvenir à trouver de jeunes.
ENQUÊTE

Et si la réforme de l'apprentissage était déjà victime de son succès ? Juste avant l'été, le ministère du Travail se réjouissait du nombre record d'apprentis en France : près de 460.000. À la rentrée, l’envolée semble s’être poursuivie, si bien que tous les jeunes qui se tournent vers l'apprentissage ne réussissent pas à trouver des entreprises pour les former.

L'une des grandes innovations de la réforme tient au fait que l’on peut démarrer son apprentissage à n'importe quel moment dans l'année. Sauf que les habitudes ont la vie dure : aujourd'hui encore, l'essentiel des signatures de contrats se concentre sur la rentrée. Si le chiffre global du nombre de demandes n’est pas encore disponible, quelques indications remontent déjà du terrain. Dans les Centres de formations d’apprentis (CFA) des chambres des métiers, par exemple, les effectifs sont en hausse de 3,5% par rapport à la rentrée de l'année dernière, et de 4% dans les CFA du BTP.

"Je lance un appel : il faut embaucher des apprentis !"

Conséquence de cette hausse de la demande : beaucoup d'apprentis peinent à trouver des entreprises. Ils sont 15.000, rien que dans le réseau des chambres des métiers. Titulaire d’un bac+2, Sabrine, 24 ans, cherche depuis deux mois une entreprise pour faire son apprentissage de photographe. "Je pensais que ça allait être simple, mais ça ne l’est pas du tout. J’ai appelé plusieurs laboratoires photo, envoyé des C.V. La plupart me disent qu’ils cherchent des jeunes entre 18 et 20 ans, et essayent de me faire comprendre que mon âge dérange", explique-t-elle.

Les employeurs semblent donc frileux, après avoir largement répété pourtant que l'apprentissage était une voie d'excellence. Le président de la Chambres des métiers, Bernard Stalter, les exhorte désormais à passer de la parole aux actes, et à accueillir les jeunes qui frappent à leur porte. "Cet engouement sur l’apprentissage, on l’attendait depuis longtemps. Tout est en place, on peut embaucher à tout moment un apprenti, on peut embaucher un jeune jusqu’à 30 ans, il y a des aides. Je lance un appel : il faut embaucher des apprentis !", martèle-t-il au micro d’Europe 1.

Une réforme incomplète

Et pourtant, certaines entreprises peinent toujours à trouver des apprentis. Pour Aurélien Cadiou, qui préside l'Association nationale des apprentis de France, la réforme n'a rien changé. "Ce problème de matching entre l’offre et la demande n’a pas été résolu. On a encore des jeunes qui viennent nous voir en disant qu’ils ne trouvent pas d’employeur, et des employeurs qui nous disent qu’ils ne trouvent pas de jeune", rapporte ce responsable associatif.

Le gouvernement semble toutefois avoir pris la mesure du problème : il vient de confier une mission à un haut fonctionnaire, Guillaume Houzel, précisément pour faciliter la mise en relation des demandes d'apprentissage et des offres.