Tricherie dans le secteur automobile : et maintenant les pneus ?

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AUTOMOBILE - L’ONG Transport & Environment avance que les systèmes de contrôle de la pression des pneus ne fonctionnent qu’en laboratoire.

Depuis les révélations du Dieselgate sur les pratiques de Volkswagen, le secteur automobile est entré dans l’ère du soupçon : de nombreux autres constructeurs sont montrés du doigt et les normes officielles ont perdu leur crédibilité. Mais la descente en enfer n’est peut-être pas finie : suite aux accusations visant certaines boîtes de vitesse Audi ce week-end, c’est au tour du système de contrôle de la pression des pneus d’être remis en cause. Après avoir testé ce dispositif dans de nombreuses conditions, l’association Transports et environnement soupçonne une nouvelle fois les constructeurs de multiplier les manœuvres pour enjoliver les performances de leurs véhicules.

Le TMPS disséqué. Doutant des chiffres officiels avancés par les constructeurs automobiles, Transport & Environnement a pris l’habitude de réaliser des tests indépendants pour montrer que les performances mises en avant par les marques sont très discutables. Après s’être penchée sur la consommation de carburant ou les émissions de gaz polluants, l’ONG a décidé de s’intéresser à un autre point central des véhicules modernes : le TMPS (Tyre Pressure Monitoring System), un acronyme qui désigne le système de contrôle de la pression des pneus. Plus concrètement, il s’agit de capteurs installés dans les pneus et qui informent le conducteur si un pneu est dangereusement dégonflé. Ce système est obligatoire sur tous les modèles commercialisés depuis novembre 2014.

De prime abord, s’intéresser au TMPS peut sembler très éloigné des questions environnementales, il n’en est pourtant rien : un pneu sous-gonflé a une plus grande résistance au roulement et augmente la consommation en carburant. Sans oublier qu’un pneu sous-gonflé a plus de risque d’exploser et de provoquer un accident.

De bons résultats… uniquement sur banc d’essai. Pour vérifier les performances revendiquées par les constructeurs automobiles, l’ONG a décidé de reproduire les tests réalisés par ces derniers, que ce soit sur banc d’essai ou sur circuit pour reproduire des conditions de circulation plus réelles. Chargée de réaliser ces mesures, la société d’ingénierie automobile Idiada a décortiqué le comportement de deux modèles loués : un Golf 7 de Volkswagen et une 500 L de Fiat, chacune étant équipée de pneumatiques de marques différentes (Michelin pour la première, Continental pour la seconde). Avec, à chaque fois un pneu sous-gonflé que le TMPS est censé repérer.

Sur banc d’essai, le système a fonctionné comme prévu : le TMPS a rapidement repéré qu’un pneu était dangereusement sous-gonflé et a activé un voyant sur le tableau de bord, qu’il s’agisse de la Volkswagen ou de la Fiat. En revanche, les essais sur circuit ont abouti à des résultats très éloignés de ce que les deux constructeurs avancent : les ingénieurs ont pu rouler pendant près de 70 minutes sans aucune alerte du véhicule alors que le pneu était clairement sous-gonflé. Sauf que le TMPS aurait dû tirer la sonnette d’alarme au bout de dix minutes maximum.  En répétant l’opération avec tous les pneus légèrement sous-gonflés, et non un seul, le système n’a donné l’alerte que dans un essai sur six.

Des appareils uniquement conçus pour les tests sur banc d’essai ? Comme avec les mesures d’émissions de gaz polluants, les détecteurs de pression dans les pneus n’ont fonctionné que sur banc d’essai, et non dans des conditions réelles. Transport & Environment en déduit que ces appareils ne fonctionnent pas aussi bien qu’annoncé et mettent en danger le conducteur et les passagers du véhicule.

Pour l’ONG, cet écart entre performances en laboratoire et performances réelles pourrait aussi s’expliquer par le comportement des constructeurs automobiles : ces derniers pourraient être tentés de paramétrer le TMPS pour fonctionner uniquement sur banc d’essai, comme c’était le cas du système antipollution de Volkswagen. Transport & Environment demande donc que des investigations plus poussées soient menées et que l’homologation se fasse désormais dans des conditions de circulation réelles.