Impôts, prélèvements : ce qui attend ménages et entreprises après les annonces d’Edouard Philippe

© PHILIPPE HUGUEN / AFP
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Le Premier ministre a promis de réduire d’un point de PIB la "pression fiscale" d’ici la fin du quinquennat. À quoi les ménages et les entreprises doivent-ils s’attendre ?

La France ne "peut pas demeurer la championne des impôts", a lancé Edouard Philippe mardi, lors de son discours de politique générale à l’Assemblée. Le Premier ministre s’est engagé  à "faire baisser la pression fiscale d'un point de PIB en cinq ans". "Les prélèvements obligatoires baisseront de 20 milliards d'euros d'ici 2022", a précisé le chef du gouvernement. Comment va se traduire cette baisse d’impôts ? Est-elle viable ? Eléments de réponse.

Des baisses pour les ménages et les salariés…

Le Premier ministre a confirmé mardi une série d’engagements pris par Emmanuel Macron en matière de fiscalité. Premier d’entre eux : une "réforme de la taxe d’habitation" aura bien lieu. Elle interviendra d’ici la fin du quinquennat après une "concertation" avec les collectivités territoriales. Durant la campagne, le candidat d’En Marche ! avait promis une exonération de cette taxe pour 80% des ménages. Un chiffre qui n’a pas été confirmé mardi par le Premier ministre.

La majorité de la baisse sur la "pression fiscale" interviendra au niveau des cotisations. Edouard Philippe a ainsi confirmé mardi la suppression dès 2018 "des cotisations salariales sur l'assurance maladie et l'assurance chômage".

Le Premier ministre a enfin annoncé un report à 2019 de la réforme de l'impôt sur la fortune (ISF), destinée à encourager l'investissement dans les entreprises et jusque-là annoncée pour 2018. La réforme, qui prévoit de recentrer l'ISF sur le seul patrimoine immobilier, "sera votée dès cette année, dans la loi de finances pour 2018, et entrera en vigueur en 2019", a déclaré le chef du gouvernement lors de son discours de politique générale à l'Assemblée nationale. À la place, un taux de prélèvement unique d’environ 30% sur les revenus de l’épargne sera voté, a ajouté le Premier ministre, sans donner de date.

… Et d’autres pour les entreprises

Une bonne part des allègements devraient aussi directement bénéficier aux entreprises. Le taux de l’impôt sur les sociétés sera réduit par étapes de 33% à 25% d’ici à 2022, cette trajectoire étant fixée dans la future loi de Finances pour 2018.

Le Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) serait par ailleurs transformé en allègement de charges en 2019, soit un an plus tard que prévu. "Le CICE sera transformé en un allègement de charges, qui seront nulles au niveau du Smic", a-t-il déclaré lors de son discours de politique générale devant l'Assemblée nationale.  "La réforme entrera en vigueur au 1er janvier 2019", a-t-il précisé.

" Cela ressemble à une légère austérité, avec tous les risques sur la croissance que cela comporte "

Créé en 2013 par l'ancien président François Hollande afin d'accroître la compétitivité des entreprises, le CICE est une réduction d'impôts, calculé en fonction de la masse salariale hors salaires supérieurs à 2,5 fois le Smic. Son taux est passé de 4% de la masse salariale brute en 2013 à 7% en 2017. Emmanuel Macron, pendant la campagne présidentielle, avait promis de le transformer dès 2018 en baisse de cotisations pérennes pour l'ensemble des entreprises de l'ordre de six points, et jusqu'à 10 points pour les salaires au niveau du Smic.

Quelques hausses déjà prévues… et d’autres à prévoir ?

Il n’y aura, toutefois, pas que des baisses d’impôt à prévoir durant le prochain quinquennat. Le Premier ministre a d’abord confirmé mardi une hausse de 1,7 point de la Contribution sociale généralisée (CSG) pour compenser la baisse des cotisations salariales. "La suppression des cotisations salariales sur l'assurance maladie et l'assurance chômage, financée par un transfert sur la CSG, redonnera dès 2018 du pouvoir d'achat à plus de 20 millions d'actifs. Cela représente 250 euros par an au niveau du Smic", a-t-il détaillé lors de sa déclaration de politique générale, déclenchant de vifs applaudissements.

Edouard Philippe a en outre annoncé que la convergence entre la fiscalité du diesel et de l'essence serait réalisée "avant la fin de la mandature", en 2022, confirmant ainsi une promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron. La montée en puissance de la fiscalité carbone sera également "accélérée", a affirmé le chef du gouvernement.

Malgré ces quelques hausses prévues, la baisse d’un point du PIB sur l’ensemble du quinquennat devrait être atteinte. "Selon nos calculs, les baisses déjà annoncées dépassent même les 20 milliards promis par Edouard Philippe. L’exécutif se laisse donc une marge de manœuvre pour envisager des nouvelles hausses à prévoir à l’avenir", assure à Europe 1 Eric Heyer, économiste à l’OFCE, qui prépare une conférence de presse, le 12 juillet prochain, pour décortiquer les mesures promises par le nouvel exécutif.

 

Quid de l’équilibre des dépenses publiques ?

Pour compenser cette baisse de la fiscalité, Edouard Philippe a annoncé mardi une baisse des dépenses publiques de l’ordre de trois points du PIB, soit environ 60 milliards d’euros. En ligne de mire : une réduction du déficit en dessous des 3% du PIB dès cette année. "Aucun ministère ne sera sanctuarisé", promet le Premier ministre.

Pour l’économiste Eric Heyer, cette coupe à prévoir s’apparente tout de même "à une légère austérité, avec tous les risques sur la croissance que cela comporte". Seule certitude : le gouvernement s’est engagé à lancer un plan d’investissement de 50 milliards d’euros, pour maintenir la croissance malgré ces coupes à prévoir. "C’est un point positif. Mais il va falloir surveiller les autres coupes. Lorsque vous enlever du pouvoir d'achat pour les fonctionnaires et des aides pour les ménages modestes, cela impacte la croissance", prévient Eric Heyer. Et de conclure : "Le problème, c’est que l’on est dans le flou total sur les dépenses publiques, aucun cadre précis n’a été fixé".