Taxer les jeux de hasard : un pari osé ?

Le député socialiste du Cher Yann Galut a demandé au gouvernement de taxer les gains aux jeux d'argent et de hasard, visant les gains de plus de 30.000 euros à hauteur de 15 %.
Le député socialiste du Cher Yann Galut a demandé au gouvernement de taxer les gains aux jeux d'argent et de hasard, visant les gains de plus de 30.000 euros à hauteur de 15 %. © MAXPPP
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Un député PS propose une taxe sur les gains de plus de 30.000 euros. Une idée non sans risques.

"Cela ne me dérange pas de taxer le rêve pour améliorer la réalité". Le député socialiste du Cher, Yann Galut, pense tenir une bonne opportunité pour renflouer un peu le budget de l’État. Son idée? Une taxe sur les jeux d'argent et de hasard, à hauteur de 15% sur les gains de plus de 30.000 euros.

Le député a écrit au gouvernement afin de "lancer le débat" sur la question. "Au moment où des efforts sont demandés à tous les Français, les sommes de plus en plus exorbitantes à certains jeux de hasard ont quelque chose d'indécent", estime le député, contacté par Europe1.fr.

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>>> Combien cela pourrait-il rapporter? Cela aura-t-il des effets pervers? Éléments de réponse.

Yann Galut

• Quel est le dispositif actuel? Aujourd'hui, le gagnant n'est pas imposé à la base, sur la somme qu'il touche en elle même. Il est simplement assujetti à l'ISF l'année d'après sa victoire. Et il paie ensuite des impôts sur les intérêts qu'il touche en moyenne chaque jour grâce à ses gains. Seuls certains joueurs de poker, qui tirent l'essentiel de leurs revenus de ce jeu, peuvent être imposables sur leurs gains initiaux, depuis octobre 2010.

• Comment fonctionnerait la mesure? Celui qui gagnerait plus de 30.000 euros se verrait taxer à 15% pour tout ce qui dépasse ce montant. Ainsi, s'il gagne 35.000 euros, l’État lui prendra 15% de 5.000 euros. "Le gagnant ne serait imposé qu'une seule fois, au moment où il empoche les gains ou l'année suivante", précise Yann Galut. Dans le cas du célèbre gagnant du Loto de la semaine dernière, qui a empoché 169 millions d'euros, l’État percevrait avec cette taxe un peu plus de 25 millions au total.

824 millions par an attendus en Espagne

loto

• Combien cela pourrait rapporter ? "Il y a eu sept milliards de gain en 2011 pour les jeux de hasard. Avec une taxe à 15%, j'estime les recettes à un milliard part an", avance le député, tout en reconnaissant "que ce n'est pas un calcul scientifique." "J'ai surtout écrit au gouvernement pour lancer un débat qui vaut le coup d'être lancé", s'explique-t-il.

• Et à l'étranger ? À titre de comparaison,  l'Espagne a instauré, dans le cadre de son dernier plan d'austérité, une taxe de 20% sur les gains supérieurs à 2.500 euros. Elle concerne davantage de gagnants que la proposition Française, mais ne s'adresse pas aux jeux sur internet ou à certains jeux à gratter comme le "Bingo." Le gouvernement en attend 824 millions d'euros de recettes, selon El Pais. Aux Etats-Unis, dans certains Etats, les gros gagnants sont même taxés à 50%. En septembre dernier, un ingénieur du Michigan avait en effet vivement protesté contre "l'Oncle Sam", (l'Etat) qui lui avait prélevé 158 milliards de dollars sur 337.

• Un risque pour la croissance? Un tel impôt pourrait en effet réduire la consommation des gagnants. "Mais ceux qui gagnent de telles sommes épargnent plus qu'ils ne consomment", tempère Yann Galut. "Ils peuvent investir à l'étranger, essayer de trouver la bonne niche fiscale. Au final, la taxe devrait permettre de résorber un peu le déficit", défend-il.

La Française des jeux (FDJ) met également en avant la forte taxation déjà à l'œuvre sur ses jeux. Un renchérissement pourrait freiner la consommation de tickets. Actuellement, 40% de la mise sur un billet de loto revient à l'Etat, par exemple. Le pourcentage est de 25% pour l'ensemble des jeux de hasard de la FDJ, ce qui rapport déjà 2,7 milliards par an à l'Etat. "La FDJ a raison de rappeler ça. Mais la consommation de jeux n'a jamais été si forte qu'aujourd'hui. Les joueurs continueront de jouer malgré la taxe", rétorque le député socialiste.