Ruptures "amiables" ou licenciements déguisés ?

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Rédaction Europe1.fr , modifié à
Les ruptures conventionnelles de contrat de travail par consentement mutuel entre salarié et employeur ne cessent de se multiplier depuis leur création à l’été 2008. Sans "dérive globale", assure le directeur général du Travail.

Depuis juillet 2008, 67.000 "ruptures conventionnelles" de CDI ont été enregistrées. Cette fin de contrat négociée "à l’amiable" entre employeur et employé a été rendue possible par la loi de modernisation du marché du travail. Un dispositif largement critiqué au moment de son lancement car même s’il ouvre droit pour les salariés à des indemnités de chômage, il s’avère aussi moins coûteux pour les employeurs. Surtout en temps de crise.

"Nous ne constatons pas d'effet d'aubaine ou de dérive globale", assure le directeur général du Travail, Jean-Denis Combrexelle. "C'est un instrument juridique qui permet de recueillir le consentement des deux parties, l'employeur et le salarié, lorsqu'il y a accord sur le départ de l'entreprise. Jusqu'à présent, il pouvait y avoir de faux licenciements et des transactions", argumente-t-il encore.

Les syndicats pointent, de leur côté, une explosion du nombre de "ruptures conventionnelles" depuis le début de l’année, au plus fort de la crise, avec 9.226 procédures en janvier, 12.928 en février et 13.326 en mars. Selon la CGT, des PME ont ainsi fait d'un coup 8-9 licenciements économiques et 4-5 ruptures conventionnelles, pour éviter un plan de sauvegarde de l'emploi obligatoire à partir de 10 licenciements.

"Difficile de prouver en justice que le consentement du salarié est vicié", estime la juriste CGT Anne Braun. Pour elle, cette procédure repose sur une "supercherie initiale : être d'égal à égal avec l'employeur". A l'inverse, Marcel Grignard juge, pour la CFDT, que ces "ruptures conventionnelles" apportent "un minimum de garanties et de vérifications, alors que les ruptures de gré à gré, qui devaient souvent se passer dans des conditions douteuses, allaient croissant".

Les économistes Pierre Cahuc et André Zylberberg jugent même que certains salariés pourraient profiter de cette procédure pour "faire une pause de quelques mois tout en percevant une rémunération confortable" avant un nouvel emploi. Une opportunité réservée cependant aux employés "qualifiés" ou seniors.