Les salariés ne voteront peut-être plus pour les prud'hommes

© Maxppp
  • Copié
Noémi Marois avec AFP , modifié à
REFORME - L'Assemblée a voté le projet de loi prévoyant la suppression des élections des conseillers prud'homaux.

Recul de la démocratie pour certains, mesure de simplification et d'économie pour d'autres. L'Assemblée nationale a adopté définitivement jeudi soir le projet de loi prévoyant la suppression des élections des conseillers prud'homaux au suffrage direct. Les salariés ne seront donc plus appelés tous les quatre ans à voter au suffrage direct. Ce sont les syndicats qui désigneront désormais les conseilleurs prud'homaux. Un autre projet de loi, qui vise à réduire les temps d'attente et à éviter un taux d'appel excessif, sera présenté en Conseil des ministres le 10 décembre prochain.  

>> LIRE AUSSI - Véronique Brocard : un témoignage au cœur des prud'hommes

Qui sont les conseilleurs prud'homaux ?  Les conseillers prud'homaux, particularité française depuis 1806, sont des juges non professionnels issus du monde du travail qui règlent les litiges entre les employés et leurs employeurs.

Au nombre de 14.500 en France, ils seront désormais désignés tous les quatre ans par les organisations syndicales et patronales. La loi votée jeudi soir prolonge également le mandat des conseillers actuels, jusqu'au prochain renouvellement qui devra avoir lieu avant le 31 décembre 2017. Le détail de la désignation par les syndicats sera décidé plus tard par ordonnances, mais il pourrait se faire au prorata de leurs audiences respectives.

Des électeurs de moins en moins nombreux… Les élections prud’hommales existent depuis 1979. Le gouvernement justifie pleinement sa suppression en avançant le nombre d'électeurs qui n'a cessé de baisser, jusqu'à 25% en 2008. Argument balayé par certains parlementaires. Selon eux, il faudrait à ce moment là également supprimer les élections départementales ou encore les élections européennes. 

Mais petit souci, la solution de remplacement par les syndicats ne règle pas le problème. Il n'y a pas non plus foule dans les élections syndicales. Seulement 8% des salariés français sont syndiqués. 

>> LIRE AUSSI - La lenteur des prud'hommes fustigée

…Et de sacrés économies à la clef. Un autre argument en faveur de la suppression de ces élections est le coût économique. En 2008, l'organisation des élections prud'hommales ont coûté 87 millions d'euros à l'Etat. 

Une perte d'indépendance ? La suppression de l'élection par les salariés peut entraîner une perte de légitimité des conseillers, ont jugé certains députés. Gérard Cherpion (UMP) comme Denys Robiliard (PS) ont ainsi relevé que "l'élection donne au conseil une légitimité importante" et une "indépendance" à l'égard des organisations. 

Les chômeurs, oubliés de la réforme ? Le gouvernement, pour prendre cette nouvelle mesure, a dit s'être appuyé sur  les réformes de la représentativité syndicale de 2008 et patronale de 2014. Elles permettent de mesurer l'audience des organisations. 

Mais plusieurs parlementaires ont fait savoir que les résultats des élections syndicales et prud'homales ne sont pas tout à fait les mêmes. La raison ? Les chômeurs participent aux secondes et non aux premières. Avec cette mesure donc, les organisations syndicales choisiront les conseillers au nom des salariés seulement alors qu'auparavant, les chômeurs avaient voix au chapitre.

Un chômeur, mais aussi un stagiaire ou un retraité, pouvait en effet voter aux élections prud'homales, en se déplaçant dans les bureaux de vote mis en place en mairie.

>> LIRE AUSSI - Désormais, votre patron peut abaisser votre salaire