Les patrons jugent la France de moins en moins attractive

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Anne-Laure Jumet avec , modifié à
INFO E1 - Un sondage Ernst & Young a sondé les entreprises implantées dans l’Hexagone : pour 77% d’entre elles, la France est moins attractive.

Si la France reste l’un des pays qui attire le plus d’investissements étrangers, elle est en train de perdre du terrain. C’est ce que montre un sondage Ipsos pour Ernst & Young (EY), révélé par Europe 1 et qui souligne que 77 % des patrons d'entreprises étrangères implantées en France jugent que notre pays n'est pas attractif. Et plus d’une entreprise étrangère sur deux juge que l’attractivité de notre pays s’est plutôt dégradée en un an. Résultat, trois multinationales sur quatre n'ont pas l'intention d'investir davantage en France.

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La faute à un Etat jugé peu stratège. Si les entreprises hésitent à investir en France, c’est parce que l’Hexagone a envoyé beaucoup de signaux négatifs ces derniers temps. Dernier épisode en date, la privatisation de l'aéroport de Toulouse n’a pas seulement attiré des entrepreneurs chinois, mais aussi un groupe australien et un autre espagnol. Sauf que ces deux entreprises ont finalement préféré jeter l’éponge.

En cause, l’attitude de la France dans deux dossiers récents : l’écotaxe, avec la remise en cause du contrat passé avec la société privée Ecomouv, puis le dossier des autoroutes, avec la volonté affichée par l'Etat de taxer les profits de ces sociétés. Une instabilité qui décourage plus d’une entreprise d’investir dans l’Hexagone. 

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Les multinationales préfèrent réduire la voilure. Non seulement la France est jugée moins attractive mais elle commencerait même à faire fuir certaines sociétés. Des multinationales font maigrir leurs structures en France pour ne conserver sur notre territoire que de petites entités et faire partir le gros de leurs équipes dans d’autres pays, principalement en Allemagne et au Royaume-Uni.

Ce phénomène s’accélère depuis plusieurs mois, notamment dans le secteur de l’électronique grand public. La dirigeante d'une fédération patronale résume le sentiment général : "vous n'allez pas dans un pays dont vous ne comprenez pas les règles. Le droit du travail est trop complexe et il y a trop d'instabilité fiscale en France".

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Et même les multinationales françaises préfèrent l’étranger. Les sociétés étrangères ne sont pas les seules à déserter l’Hexagone, des sociétés françaises suivent aussi la tendance. Ainsi, un industriel vient de choisir l'Asie plutôt que la France pour moderniser son outil de production. Officiellement, à cause du manque de flexibilité en France. Autre exemple, dans le secteur de la santé : un groupe souhaitait développer un nouveau produit pharmaceutique. Mais il a été effrayé par la loi Touraine et va finalement réaliser cet investissement aux Etats-Unis.

Un appel à aller "plus vite, plus loin, plus fort". Histoire de bien faire passer le message, plus de 80 patrons ont signé mercredi dans Les Echos un appel à accélérer les réformes. Un document signé notamment par le cabinet d’audit financier, mais aussi d’ingénierie fiscale, Ernst & Young. "La pente n’est pas bonne et à un moment on va vraiment décrocher. Il faut éviter ce décrochage, un petit peu comme les coureurs cyclistes lors du Tour de France. On commence à être en queue de peloton et si on ne pédale pas plus vite que les autres, on va décrocher", résume le président de la branche française d’EY, Jean-Pierre Letartre.

Et ce dernier d’ajouter : "il y a des messages positifs, le ‘j’aime l’entreprise’, la question du coût du travail, la compétitivité. En même temps, il y a des signaux négatifs : le compte pénibilité, la loi Hamon sur les cessions d’entreprises. Ces messages incohérents entrainent une certaine inquiétude et il faut se mobiliser pour redresser cette pente qui n’est pas bonne et qui est essentiel pour la création d’emplois dans le pays".

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